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Par Lisa Romeo
Publié le 12/08/2010 • modifié le 16/04/2020 • Durée de lecture : 4 minutes

Le président Anouar al-Sadate en 1977 à Tel Aviv

AFP

L’homme

Sadate obtient son certificat d’étude en 1936 et souhaite se tourner vers une carrière militaire afin de servir son pays. Il profite alors de l’ouverture opérée par le parti Wafd au pouvoir qui, désireux de développer l’armée, décide d’ouvrir les candidatures d’entrée de l’Académie Militaire jusque là réservée à l’aristocratie, à la classe moyenne. Il en sort officier en 1938 et est affecté à la garnison de Manqabab. C’est là qu’il rencontre Gamal Abdel Nasser avec qui il fondera quelques années plus tard le mouvement des Officiers Libres. Très patriotique, il admire des personnalités comme Saad Zaghlul, Mustafa Kamil, Ahmad Urabi ou Atatürk qui symbolisent la lutte contre l’impérialisme ; il rêve de libérer son pays du joug britannique.

Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, il voit dans l’affaiblissement politique de la Grande-Bretagne l’occasion de se débarrasser des Britanniques. Il noue alors des contacts avec l’Allemagne nazie et est arrêté en 1942 pour espionnage au profit de l’Axe. Il réussit à s’échapper et vit dans la clandestinité jusqu’en 1945. Il se rapproche alors des Frères musulmans avec qui il participe à des attentats contre des personnalités du régime comme Amin Osman, ministre des Finances du gouvernement Wafd. Il est une nouvelle fois envoyé en prison pendant près de trois ans. Après avoir été expulsé de l’armée en 1948, il est finalement réintégré en 1950 et fait parti du Comité Exécutif du mouvement clandestin des Officiers Libres. Ils participent au coup d’Etat de juillet 1952 ; c’est lui qui l’annonce au peuple égyptien le 23 juillet au matin, après s’être emparé de l’Office de la Radiodiffusion. Sous la présidence de Nasser, il occupe différents postes au sein du gouvernement. Il est notamment président de l’Assemblée Nationale entre 1960 et 1968 et vice-président de l’Egypte en 1969. Le 15 octobre 1970, à la suite du décès de Nasser, il est élu président de l’Egypte par referendum avec 90 % des voix.

Sadate, président de l’Egypte

Une fois au pouvoir, Sadate met en place une nouvelle Constitution en septembre 1971 et nomme le pays République Arabe d’Egypte. Il s’éloigne peu à peu de la ligne politique mise en place par Nasser. Les relations avec Moscou se détériorent. Même s’il signe un traité de coopération et d’amitié avec l’URSS en mai 1971, il fait renvoyer les 20 000 conseillers militaires soviétiques d’Egypte le 18 juillet 1972 et choisit un chef de gouvernement plutôt pro américain, Aziz Sedki.

Il se détache aussi du socialisme arabe et de l’économie dirigiste de l’époque nassérienne au profit du libéralisme économique et encourage la privatisation. C’est la politique d’ouverture, l’infitah. Il encourage les investissements étrangers et demande de l’aide financière à l’Occident, notamment aux Etats-Unis, pour relancer le développement du pays.

Par ailleurs, la place de l’Islam est réintroduite dans la société égyptienne. La loi islamique, la charia, devient la source de législation de l’Etat. En 1976, une démocratie limitée est mise en place en autorisant le multipartisme.

Sadate et Israël

Sadate cherche à augmenter sa popularité auprès des Egyptiens. Il déclenche, au côté de la Syrie, de nouvelles hostilités contre Israël le 6 octobre 1973, lors de la fête juive du Kippour, pour récupérer la région du Sinaï occupée par l’Etat hébreu depuis 1967. Les premières victoires de l’armée égyptienne sauvent l’honneur des Arabes. Il accepte finalement d’engager un processus de paix et se rend officiellement à Jérusalem où il prononce un discours à la Knesset, le Parlement israélien, le 19 novembre 1977. C’est la première fois qu’un dirigeant arabe se rend en Israël. Il négocie ensuite à Camp David, aux Etats-Unis, des accords de paix et signe à Washington le traité de paix israélo-égyptien, le 26 mars 1979. Les troupes israéliennes doivent alors se retirer du Sinaï. Mais si son action en faveur de la paix est récompensée par l’Occident qui lui décerne, avec le Premier Ministre israélien Ménahem Beghin, le prix Nobel de la paix en 1978, elle est très mal perçue par le monde arabe, soutenu par l’URSS, qui l’accuse de trahison. Le siège de la Ligue arabe du Caire est alors transféré à Tunis et l’Egypte ne pourra réintégrer la Ligue qu’en 1991. Il favorise plutôt un nationalisme égyptien au détriment du rêve d’unité panarabe. L’opposition islamique devient de plus en plus dangereuse et les tensions confessionnelles se multiplient en Egypte. Sadate procède à des arrestations massives : 3 000 opposants, toutes tendances politiques confondues (islamistes, communistes, nationalistes), sont arrêtés en septembre 1981. Sadate est finalement assassiné le 6 octobre de la même année, lors du défilé militaire commémoratif de la guerre d’octobre 1973 par des officiers de l’organisation islamiste al-Jihad. Le vice-président Hosni Moubarak devient alors président. Les funérailles de Sadate seront marquées par de multiples hommages rendus par des dignitaires du monde entiers mais aussi par l’absence des dirigeants du monde arabo-musulman.

Bibliographie :
 Anouar el-Sadate, A la recherche d’une identité, histoire de ma vie, Paris, Fayard, 1978.
 Caroline Gaultier-Kurhan, Ali Khurhan, Magdi Abdel-Hafez Saleh, Cent mots pour comprendre l’Egypte moderne, Paris, Maisonneuve et Larose, 2004.
 Bernard Lugan, Histoire de l’Egypte des origines à nos jours, Paris, Editions du Rocher, 2002.

Publié le 12/08/2010


Lisa Romeo est titulaire d’un Master 2 de l’université Paris IV-Sorbonne. Elle travaille sur la politique arabe française en 1956 vue par les pays arabes. Elle a vécu aux Emirats Arabes Unis.


 


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