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Laurence Louër est professeure associée à SciencesPo Paris et chercheure au Centre de Recherches Internationales (CERI). Entre 2004 et 2009, Laurence Louër a été consultante permanente pour le Centre d’analyses et de prévisions stratégiques du ministère des Affaires étrangères, ainsi que rédactrice en chef de la revue Critique internationale entre 2006 et 2016. Arabisante, diplômée en philosophie, en sociologie et en science politique, de même que docteure en science politique, Laurence Louër travaille sur les politiques de l’identité et les questions d’ethnicité au Moyen-Orient. À ce titre, elle est l’auteure de plusieurs ouvrages : Les Citoyens arabes d’Israël (2003), Chiisme et politique au Moyen-Orient. Iran, Irak, Liban, monarchies du Golfe (2008), Transnational Shia Politics : Religious and Political Networks in the Gulf (2008), Sunnites et Chiites. Histoire politique d’une discorde (2017) et Sunnis and Shi’a. A Political History (2020). Ses nombreux travaux portent aussi sur les politiques sociales et de l’emploi des monarchies du Golfe. À cette occasion, Laurence Louër revient, pour Les clés du Moyen-Orient, sur les réformes et les transformations du modèle socio-économique des monarchies du Golfe, introduites à partir des années 1990.
Les monarchies du Golfe sont premièrement des États rentiers. Cette caractéristique implique deux choses. D’abord, leur Produit Intérieur Brut (PIB) est en grande partie composé des revenus des activités liées aux hydrocarbures. Leurs économies étaient traditionnellement peu diversifiées et leurs secteurs gazier et pétrolier étaient dominants, laissant peu de place à d’autres activités. La seconde conséquence est que le budget des États est lui aussi composé à 80-90% des revenus de la vente des hydrocarbures sur les marchés internationaux. La taxation est donc quasiment inexistante. De nombreuses théories existent qui tentent de comprendre les implications politiques de cette absence de taxation. Les monarchies du Golfe sont parmi les États les plus (re)distributeurs du monde, via le développement de nombreux emplois publics, la gratuité du système de santé et d’éducation, les subventions sur l’eau, l’électricité, les produits alimentaires de base mais aussi au logement.
L’autre caractéristique fondamentale du modèle socio-économique de ces États est la présence d’un régime migratoire ouvert. Le Golfe est historiquement situé au carrefour de routes commerciales et a toujours été un espace de circulation intense d’Hommes et de marchandises. La mise en place d’un système de migrations du travail de masse s’observe à partir du début de l’industrialisation pétrolière, dans les années 1930. Parce qu’il n’y avait pas de main d’œuvre industrielle locale, les compagnies pétrolières opérant dans les pays de la rive arabique du Golfe ont cherché ailleurs des travailleurs. Le régime migratoire est « ouvert » dans le sens où les flux de travailleurs sont déterminés par les besoins des employeurs. Aujourd’hui la population des travailleurs expatriés est majoritaire dans quatre des six États du Golfe – au Qatar, aux Émirats arabes unis, au Bahreïn et au Koweït – jusqu’à atteindre près de 90% au Qatar et aux Émirats arabes unis. En parallèle, il y a une très forte segmentation du marché du travail : les expatriés travaillent principalement dans le secteur privé, et sont soumis au système de la kafala. Cette institution régit les relations entre les employeurs et leurs employés expatriés, ces derniers ne pouvant pas circuler librement sur le marché du travail puisqu’ils doivent obtenir l’autorisation de leur kafil (ou employeur) pour changer d’employeur. Pour leur part, les nationaux travaillent surtout dans le secteur public, et notamment dans le secteur gouvernemental (administration), là où les États pratiquent une politique de suremploi. Cette politique est un pilier du contrat social dans les monarchies du Golfe puisque l’emploi public est le principal canal de redistribution de la rente pétrolière, avec de bons salaires, des conditions de travail peu astreignantes et même parfois des « emplois fantômes » dont la fonction est de « déguiser le chômage » comme le disent souvent les Golfiens eux-mêmes. L’objectif est aussi de donner un emploi à chaque homme – avec lequel il peut subvenir aux besoins d’une famille nombreuse. Il est à noter que les États du Golfe ont pu développer ce modèle aussi parce qu’ils ont une faible démographie, contrairement à des géants démographiques comme l’Iran ou l’Irak.
Le système de la kafala est finalement extrêmement profitable pour les employeurs parce qu’il garantit un faible coût du travail. Directement recrutés dans leur pays d’origine, les migrants viennent souvent de pays où les salaires et les conditions de travail sont médiocres et, en les privant de la possibilité de changer d’emploi librement, la kafala limite grandement leur possibilité de négocier leur contrat ou leurs conditions de travail. Le secteur privé est très attaché au système de la kafala parce qu’il lui garantit une main d’œuvre abondante, qualifiée (par rapport aux nationaux), bon marché, et surtout, « captive ».
Le principal symptôme du dysfonctionnement de ce modèle est l’apparition du chômage de masse parmi la population nationale, globalement à partir des années 1990. Les conséquences de ce chômage de masse sont très vite perçues : des manifestations de chômeurs éclatent, par exemple au Bahreïn, devant le ministère du Travail et de la Fonction publique. Le chômage de masse devient rapidement un problème de société.
Le chômage peut être expliqué par un certain nombre de mutations socio-économiques. La diminution des revenus des hydrocarbures, liée au contre-choc pétrolier du milieu des années 1980, a un impact direct sur le budget des États, qui peinent à maintenir leur politique de suremploi dans les bureaucraties. Ces mêmes bureaucraties sont hypertrophiées et dysfonctionnelles, poussant les États à entamer des réformes de la bureaucratie publique. Ensuite, notamment en raison des politiques natalistes des décennies précédentes, il y a une augmentation de la population nationale. Certains démographes affirment même qu’à l’échelle de la région, les monarchies du Golfe sont les États qui ont mené les politiques natalistes les plus extrêmes. Dans le contexte développementaliste de l’après-seconde-guerre mondiale, avoir une faible population était perçu comme une faiblesse. Ces politiques natalistes ont inévitablement mené à l’augmentation du nombre d’entrants sur le marché du travail. Il y avait donc plus de personnes à employer dans les bureaucraties, déjà surdimensionnées par rapport aux besoins réels.
Un autre facteur extrêmement important de dysfonctionnement du modèle est le changement des normes de genre. À partir des années 1990, les États tiennent un discours promouvant la participation des femmes à la société, notamment par l’éducation et le travail. Les femmes investissent donc massivement les universités locales – là où les hommes vont souvent étudier à l’étranger. L’offre universitaire locale se développe : de nombreuses universités européennes ou américaines ouvrent des branches dans les pays du Golfe. Parallèlement, les familles recourent massivement aux travailleurs domestiques pour s’occuper des enfants et des tâches ménagères, libérant pour les femmes du temps pour étudier et travailler. L’entrée des femmes sur le marché du travail est aussi liée à la volonté des pays du Golfe de diminuer la main-d’œuvre étrangère, dont ils savent qu’elle est indispensable mais qu’ils perçoivent aussi comme une source de fragilité. Ils pensent qu’inciter tous les nationaux à travailler, hommes et femmes, pourrait à long terme permettre de diminuer la part de la population immigrée. Un autre facteur de l’arrivée des femmes sur le marché du travail est l’augmentation des besoins de la population nationale. La richesse a modifié le style de vie et les standards sociaux (une grande maison, de grosses voitures, de beaux mariages pour les enfants). De plus en plus souvent, le seul salaire d’un fonctionnaire chef de famille ne suffit plus. Cette transformation des rôles de genre se manifeste aussi dans l’élévation du taux de divorce, en partie liée aux nouvelles exigences des jeunes femmes. Par exemple, nombreuses sont celles qui exigent que leur contrat de mariage inclut le respect par leur mari de leur droit à s’éduquer et à travailler. Notons que tout cela s’inscrit aussi dans un contexte où la jurisprudence islamique dominante soutient que l’argent gagné par la femme qui travaille est sa seule propriété, qu’elle n’a pas à le mettre à disposition de son mari qui, seul, se doit de pourvoir aux besoins de sa famille. Paradoxalement, c’est une norme religieuse conservatrice et patriarcale qui donne aux femmes une liberté par le travail. Toute cette transformation des modèles de genre contribue à augmenter le nombre de nouveaux entrants sur le marché du travail et à alimenter le chômage dans un contexte de moindre disponibilité d’emplois publics. Jusqu’à aujourd’hui, les chômeurs sont principalement des chômeuses, des jeunes femmes, souvent diplômées, en quête de leur premier emploi.
Ce qu’il faut noter aussi, c’est que les données officielles sur le chômage sont très peu disponibles, ou manipulées. En 2004, on sait qu’au Bahreïn, il y avait 18.4% de chômage chez les nationaux. Aux Émirats arabes unis, par exemple, les autorités publient des données en incluant l’ensemble de la population active, nationaux et expatriés. Or, par définition, ces derniers, qui sont majoritaires dans les populations actives, travaillent ou bien sont officiellement dépendants de personnes qui travaillent (épouse, enfants) et n’ont pas de visa de travail. De plus, leur dernière enquête de main-d’œuvre publique portant sur la population nationale date de 2009. Finalement, depuis quelques années, le pays le plus transparent en matière de publication de ses enquêtes de main d’œuvre est l’Arabie saoudite, où les chiffres officiels indiquent le taux de chômage des nationaux est autour de 12% depuis plusieurs années.
Les gouvernements introduisent toute une série de réformes socio-économiques pour répondre à ces dysfonctionnements, globalement à partir des années 1990 : privatisations, réforme des subventions, introduction d’une Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) pour augmenter les recettes de l’État ou encore ouverture aux Investissements Directs Étrangers (IDE). Mais les réformes qui sont au cœur des débats publics sont les réformes du marché du travail, dîtes « réformes de nationalisation des emplois » parce qu’elles ont pour objectif affiché de remplacer les travailleurs expatriés par des nationaux. La priorité a d’abord été donnée à la nationalisation des emplois dans le secteur public. Cela n’a cependant pas permis de résoudre le problème de l’hypertrophie de la bureaucratie publique, qui ne peut pas absorber tous les nationaux qui entrent sur le marché du travail. Surtout à partir des années 2000, une deuxième phase de la nationalisation est mise en place, visant le secteur privé, de longue date dominé par les étrangers. C’est un enjeu crucial car le secteur privé constitue le principal bassin d’emplois mais les difficultés sont particulièrement grandes. En effet, les salaires du privé ne sont pas attractifs pour les nationaux et les conditions de travail y sont notoirement médiocres (par exemple, jusqu’il y a peu de temps, il n’y avait qu’un seul jour de congé dans la semaine dans la plupart des pays). Le droit du travail est peu développé et très « pro-business ».
De leur côté, les employeurs ont aussi très peu d’avantages à employer des nationaux, puisqu’ils sont plus exigeants en termes de salaires, sont libres de changer d’emploi et sont souvent moins qualifiés. Ils bénéficient en revanche du soutien politique des gouvernements, qui poussent les entreprises à les recruter, voire les y contraignent. Ainsi, ils mettent en place des quotas de nationaux, variant selon les secteurs : la construction en accueille moins – à cause des conditions de travail décidément trop médiocres et des salaires très bas – alors que la finance ou les télécommunications ont des quotas plus élevés. Dans certains pays, certaines professions sont exclusivement réservées aux nationaux. Ainsi à Oman et au Bahreïn, seuls les nationaux peuvent être chauffeurs de taxis. À Oman, tous les caissiers de supermarchés doivent être omanais.
Cependant, pendant longtemps, ces politiques n’ont pas très bien fonctionné. En fait, il y avait très peu de contrôles, beaucoup de corruption et un contournement généralisé des quotas. Tout cela était notamment facilité par les relations de « copinage » entre les élites économiques et les élites politiques. Les chefs d’entreprise les plus influents renégociaient les quotas de manière discrétionnaire, avaient recours aux « emplois fantômes » ou employaient des travailleurs illégaux, qui évoluaient sur un large marché noir du travail et pouvaient donc travailler sans être déclarés. L’étape décisive qui a permis une accélération de la nationalisation des emplois dans le secteur privé arrive en 2011 avec les Printemps arabes. Les manifestations au Bahreïn menacent le régime et Oman est le théâtre de manifestations dont les acteurs se plaignent du chômage, des bas salaires dans le privé, de la vie chère mais également de la corruption des élites politiques et économiques. La ville de Sohar – au Nord de Mascate et vitrine de la diversification économique du pays – est l’épicentre de la protestation : des jeunes Omanais qui travaillent dans l’industrie pour des salaires très bas en sont le fer de lance. Dans ce contexte, la perception des gouvernements du Golfe que les chômeurs forment une « classe dangereuse » se renforce. Les États accélèrent donc la mise en place des réformes. Ils accentuent notamment la pression sur les employeurs. De nouveaux instruments de politique publique sont mis en place, qui visent à inciter plus qu’à contraindre les employeurs à recruter des nationaux. Les efforts pour développer la formation professionnelle sont aussi accentués.
Les employeurs du secteur privé constituent la principale force d’opposition à la politique de nationalisation des emplois qui, en revanche, est plutôt bien acceptée par la population générale. Les nationaux travaillant dans le secteur privé ont par exemple une image très positive d’eux-mêmes. C’est un changement de perception du travail très intéressant à observer : ils ont tendance à se présenter comme des héros à l’avant-garde d’un nécessaire changement de culture. Ils soulignent le fait qu’ils jouent un rôle central dans le développement économique de leur pays. Ils insistent sur le fait qu’ils ont été recrutés en fonction de leurs compétences, de leurs qualifications et non grâce à la wasta – le « piston » qui, souvent, joue dans le recrutement dans la bureaucratie publique.
Les pays les plus avancés dans ces réformes sont les pays les moins dotés en hydrocarbures per capita, c’est-à-dire le Bahreïn – qui a été pionnier – et Oman, mais aussi l’Arabie saoudite, qui s’y est engagé plus tardivement mais a connu une remarquable accélération ces dernières années. Au Bahreïn, le gouvernement a introduit très tôt des « instruments économiques » pour inciter les employeurs à recruter des nationaux. Il a par exemple introduit une taxe payée par les employeurs sur chacun de leurs employés expatriés. Ces revenus sont ensuite réinjectés, non pas dans le budget général de l’État, mais dans un fonds pour la formation professionnelle des Bahreïnis et pour l’aide aux entreprises en difficulté. Cette réforme, qui a suscité une très forte opposition des employeurs au départ, est finalement aujourd’hui bien appliquée dans le pays.
Les Émirats arabes unis, très innovants de manière générale, le sont aussi en termes de politiques publiques. Ils ont été les premiers à assumer de changer leur modèle migratoire, embrassant d’avoir une population cosmopolite vecteur de pluralisme culturel. Ils passent d’un modèle migratoire basé sur la migration temporaire et avec un fort « turn-over » des migrants, recrutés sur la base de contrats courts et peu qualifiés à un modèle basé sur une migration plus longue et autorisant une mobilité sur le marché du travail à partir d’un certain niveau de qualification. Dans la mesure où ils sont recrutés pour un emploi plus qualifié et mieux rémunéré, les expatriés peuvent ainsi changer d’emploi sans demander l’avis de leurs employeurs. Ainsi, on assiste à une augmentation des qualifications et des salaires de la population expatriée, dont il est attendu qu’elle participe pleinement à la société de consommation. Plus qualifiés et mieux rémunérés, les expatriés pourront envisager un avenir sur le moyen et long terme, faire venir leur famille, dépenser leur salaire dans le pays, dans le secteur de la santé privée ou des loisirs. C’est un moyen de stimuler la diversification économique. Ce changement du modèle migratoire émirien concerne bien sûr la classe moyenne et aisée. Le système migratoire est donc à deux vitesses. Cette politique, impulsée aux Émirats arabes unis, est aujourd’hui suivie au Bahreïn et même, bien qu’encore timidement, en Arabie saoudite.
Les monarchies du Golfe changent donc progressivement de discours sur l’immigration, moins présentée comme une menace et plus comme une richesse. En revanche, la citoyenneté, elle, reste réservée aux nationaux. Ce verrou est profondément enraciné dans l’économie politique des pays de la région. En effet, les gouvernements ne distribuent pas des revenus qui proviennent d’impôts ou de cotisations sociales – comme dans notre modèle d’État providence – mais des revenus qui proviennent d’une ressource finie, non renouvelable. Les hydrocarbures apparaissent donc comme une richesse « du sous-sol national » qui ne doit bénéficier qu’aux « fils du sol ». Dans un tel modèle, plus il y a de personnes dotées de la nationalité et des droits à la redistribution qui y sont attachés, plus la part de chacun diminue. C’est l’exact contraire d’un système où ce qui est redistribué provient des impôts ou cotisations, comme en France par exemple, dans lequel plus il y a de personnes qui participent au système d’imposition ou de taxation, plus il y a d’argent à réinjecter dans les services publics. En réalité, en finir avec cette citoyenneté que j’appelle « castée » implique d’en finir avec un système fiscal rentier dans lequel, notamment, travail et redistribution sont dé-corrélés.
La priorité des monarchies du Golfe a été de développer le secteur privé, afin de créer plus d’emplois qualifiés et bien payés. Il faut certes diversifier l’économie via le développement du secteur privé, mais surtout diversifier le secteur privé. La diversification est parfois réelle, avec l’investissement dans des secteurs comme le tourisme, la finance, l’immobilier (professions qualifiées du bâtiment, architectes, ingénieurs…) comme aux Émirats arabes unis ou au Bahreïn. Au Bahreïn et à Oman, plus de la moitié de la population nationale travaille désormais dans le secteur privé. Dans ces pays, on note de plus en plus la présence de jeunes nationaux, hommes et femmes, qui travaillent comme vendeurs et vendeuses dans les centres commerciaux, sont employés dans des hôtels ou dans des cafés et restaurants, et ce alors même que ce type d’emploi était auparavant peu légitime socialement, notamment pour les jeunes femmes. Les pays les plus riches per capita (Koweït, Qatar et Émirats arabes unis) sont beaucoup moins avancés sur ce plan.
Cependant, on assiste parallèlement au développement d’une forme accentuée de patrimonialisme depuis une quinzaine d’années, qui brouille les frontières entre le privé et le public. Ainsi, les membres des familles royales s’investissent massivement dans l’économie privée, souvent de manière peu transparente. Dès lors, sont-ils des acteurs publics ou des acteurs privés ? Avec quel argent investissent-ils ? Cet aspect amène à questionner le phénomène de développement du secteur privé. De la même manière, la diversification du secteur qui est localement appelé « privé » est en réalité surtout portée par des entreprises parapubliques, c’est-à-dire des entreprises dans lesquelles l’actionnaire principal est l’État. C’est le cas de la plupart des compagnies du secteur industriel par exemple, mais aussi de certaines banques ou de compagnies de télécommunication. Au fond, l’État impulse le développement de secteurs jugés porteurs (historiquement l’aluminium, la pétrochimie, la finance par exemple) ou impliquant un haut niveau de risque (nouvelles technologies) – là où les grands conglomérats familiaux sont plus « conservateurs » et investissent surtout dans des secteurs comme le commerce de détail ou le tourisme… Si la diversification économique est réellement enclenchée dans la plupart des monarchies du Golfe, il reste difficile de percevoir ses mécanismes, du fait de ce brouillage des frontières entre les secteurs et les acteurs du public et du privé.
Justine Clément
Justine Clément est étudiante en Master « Sécurité Internationale », spécialités « Moyen-Orient » et « Renseignement » à la Paris School of International Affairs (PSIA) de Sciences Po Paris. Elle a effectué un stage de 5 mois au Centre Français de Recherche de la Péninsule Arabique (CEFREPA) à Abu Dhabi en 2021, où elle a pu s’initier au dialecte du Golfe. Elle étudie également l’arabe littéraire et le syro-libanais.
En 2022 et 2023, Justine Clément repart pour un an au Moyen-Orient, d’abord en Jordanie puis de nouveau, aux Émirats arabes unis, pour réaliser deux expériences professionnelles dans le domaine de la défense.
Laurence Louër
Laurence Louër est professeure associée à SciencesPo Paris et chercheure au Centre de Recherches Internationales (CERI). Entre 2004 et 2009, Laurence Louër a été consultante permanente pour le Centre d’analyses et de prévisions stratégiques du ministère des Affaires étrangères, ainsi que rédactrice en chef de la revue Critique internationale entre 2006 et 2016. Arabisante, diplômée en philosophie, en sociologie et en science politique, de même que docteure en science politique, Laurence Louër travaille sur les politiques de l’identité et les questions d’ethnicité au Moyen-Orient. À ce titre, elle est l’auteure de plusieurs ouvrages : Les Citoyens arabes d’Israël (2003), Chiisme et politique au Moyen-Orient. Iran, Irak, Liban, monarchies du Golfe (2008), Transnational Shia Politics : Religious and Political Networks in the Gulf (2008), Sunnites et Chiites. Histoire politique d’une discorde (2017) et Sunnis and Shi’a. A Political History (2020). Ses nombreux travaux portent aussi sur les politiques sociales et de l’emploi des monarchies du Golfe.
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