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Kitsch ou pas kitsch ? C’est la question posée actuellement à l’Institut des Cultures d’Islam à travers une nouvelle exposition haute en couleur, mais également haute en questionnement. En effet : que signifie « kitsch » ? Qu’est-ce qui est kitsch et qu’est-ce qui ne l’est pas ? Selon Victoria Ambrosini-Chenivesse, commissaire de l’exposition et familière du kitsch, ce dernier représente une esthétique particulière. « Dans son sens premier, le mot ‘kitsch’ signifie littéralement ‘faire du neuf avec du vieux’ ». Ainsi, les notions de recyclage et de récupération des « objets amassés dans la rues » est abordée. Le kitsch c’est aussi l’idéal, la beauté, le rêve, les couleurs et les paillettes ; l’enjolivement parfois nécessaire du réel.
L’exposition est conçue comme un « parcours » le long de cette définition du Kitsch.
Quinze artistes arabes, turcs et iraniens définissent ensemble ce code artistique. Ainsi, Sissi Farassat, iranienne diplômée de l’International Summer Academy et de la School of Fine Art de Vienne, propose des oeuvres ornées de sequins, de paillettes et de couleurs. De mauvais goût pour les uns, profondes pour les autres, et si ces couleurs étaient finalement le cadre d’un combat et d’une revendication plus profonde, d’interrogations et de réflexions plus complexes et politisées ? Ces paillettes et ces sequins sont en fait la parure enjolivée de réalités, et couvrent des passeports représentant les objets de l’exil. En regardant de plus près, les perles dessinent un tanks et des armes de guerre sur un tapis afghan, symbole de l’occupation occidentale des années 1980. L’autoportrait de Khosrow Hassanzadeh, artiste et acteur iranien, propose un univers paradisiaque et idyllique cependant réalisé à la suite d’attentats. Loin des paillettes, Sabhan Adam, artiste syrien de renommée internationale présente un univers sombre, « habité par la douleur et la mort » à travers la représentation d’un enfant. Plus loin, l’ultra « kitschité » des fleurs en plastiques de Mohamad Haj Kab illustre en fait une cuisante réalité : les fleurs ne poussent pas dans le désert ni sur les champs de bataille de Syrie, alors les Syriens fleurissent leur vie avec de fausses fleurs. Hany Rashed, artiste égyptien exposé au Tate Modern de Londres et confronté à la censure sous Moubarak, propose des oeuvres soit absolument neutres, ou au contraire totalement engagées. Son oeuvre Cartoon War, dénonce les guerres au Moyen-Orient, au moyen d’une superposition de dessins enfantins, mais dont l’écho critique résonne cependant très fort.
(Khosrow Hassanzadeh, Ready to order, 2007-2008 Boite lumineuse. Technique mixte – Avec l’aimable autorisation de l’artiste)
Les artistes posent également à travers leurs oeuvres une question fondamentale : à quel registre appartient le kitsch ? Cet art est revendiqué en tant qu’art de la rue, ou en tout cas, en tant qu’art populaire. Il revendique une appartenance démocratique et une représentation du peuple. D’autres réflexions sont également menées au fil du kitsch, des réflexions plus sociales. Shirin Aliabadi, iranienne diplômée d’Histoire de l’art et d’archéologie, propose une série de portraits de femmes iraniennes voilées de foulards à poids, à rayures ou à motifs colorés. Elle invite à s’attarder sur le pansement que porte chaque femme sur le nez, signe d’une récente rhinoplastie. En effet, à travers ce pansement, l’artiste met en avant cette volonté d’uniformité et d’appartenance à un idéal occidental. Lara Baladi, artiste libanaise, propose quant à elle une oeuvre où le désert est roi. Cependant, s’y logent des personnages iconiques : le lapin toujours en retard d’Alice au Pays des Merveilles, une sirène, mais également le sphinx égyptien. Elle propose ainsi une réflexion sur le cliché culturel égyptien. Dès lors, cette exposition est une invitation à la réflexion autour des notions de « catégorisation », d’« identité », de « stéréotypes » et de « préjugés ». Selon Jamel Oubechou, Président de l’ICI, « c’est une autre façon d’entrer, par ce qui pourrait apparaître comme des chemins de traverse, dans un débat sur l’identité que nous avons commencé à mener par ailleurs sur ceux et celles que nous nommons les musulmans en France. »
(Mohamad Haj Kab, Hearts love to burn, 2007 - Photographie. Avec l’aimable autorisation de l’artiste)
En parallèle de cette exposition, l’Institut des Cultures d’Islam propose également une programmation de qualité et colorée : concerts, arts de la scène, projections de films Bollywoodiens… une programmation haute en couleur. Alors, serez vous kitsch ou pas kitsch ?
(Sabhan Adam, Sans titre, 2014 - Technique mixte sur toile. 175x148 cm - Courtesy Polad -
Hardouin)
L’ICI est ouvert en entrée libre :
mardi-jeudi : 13h00 - 20h00
vendredi : 16h00-20h00
samedi-dimanche : 10h00-20h00
ICI GOUTTE D’OR
56 rue Stéphenson, 75018 Paris
ICI LÉON
19-23 rue Léon, 75018 Paris
01 53 09 99 84
Louise Plun
Louise Plun est étudiante à l’Université Paris Sorbonne (Paris IV). Elle étudie notamment l’histoire du Moyen-Orient au XX eme siècle et suit des cours sur l’analyse du Monde contemporain.
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