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Par Anne-Lucie Chaigne-Oudin
Publié le 09/03/2010 • modifié le 02/03/2018 • Durée de lecture : 4 minutes

Hassan al-Banna

AFP

Les frères musulmans égyptiens

La structure de la confrérie s’organise. Un guide, le Murshid, élu par l’assemblée des sages, la Choure, dirige la confrérie. Un fois élu, le guide met en place un bureau de 15 membres, chargé de la gestion des affaires financières, culturelles et sociales. Hassan al-Banna est élu guide des Frères musulmans. La confrérie met en place des structures sociales et associatives, dans le but d’éduquer les jeunes générations. Rapidement, le mouvement dépasse les frontières de l’Egypte et se développe au Moyen-Orient, notamment en Syrie, en Palestine et en Jordanie. En 1948, lors de la création de l’Etat d’Israël, les Frères musulmans égyptiens se mobilisent en faveur des Palestiniens. La participation de l’Egypte à la première guerre israélo-arabe de 1948-1949 se solde par un échec et fragilise la société égyptienne. Afin de tenter de diminuer le mécontentement populaire, le gouvernement décide d’interdire l’organisation en décembre 1948. En réaction, la confrérie assassine le chef du gouvernement le 28 décembre. Le 12 février 1949, Hassan al-Banna est exécuté en retour par les autorités égyptiennes. A partir de ce moment, les Frères musulmans sont réprimés et leurs activités diminuent. Sur le plan politique, le président égyptien Néguib ainsi que son président du Conseil Nasser proposent aux Frères musulmans de participer au pouvoir, mais ces derniers refusent, le régime égyptien n’étant pas conforme à leur doctrine favorable à un Etat islamique. En 1954, l’organisation est interdite par Nasser et beaucoup de Frères musulmans se réfugient alors en Arabie saoudite. L’organisation est interdite jusqu’en 1970, date de l’arrivée au pouvoir du président Sadate.

Dans les années 1960, Sayyid Qotb, disciple et contemporain d’Hassan al-Banna, responsable de la propagande des Frères musulmans, est à l’initiative d’un courant plus radical au sein des Frères musulmans. Il estime que les Etats du monde arabe issus de la colonisation ne sont pas des Etats islamiques et prône l’utilisation de la violence pour les instaurer. Il est exécuté le 26 août 1966.

Sadate entreprend de réhabiliter la confrérie ainsi que d’autres opposants politiques à Nasser et privilégie en particulier les organisations islamiques afin de combattre le courant socialiste. Il est néanmoins assassiné le 6 octobre 1981 par un islamiste proche des Frères musulmans, hostile aux accords de Camp David et de la paix avec Israël signée en 1979 par Sadate. Son successeur, le président Hosni Moubarak s’attache à lutter contre les mouvements islamistes et les Frères musulmans sont réprimés, à partir de 1994. La confrérie connaît néanmoins une évolution, les jeunes souhaitant un changement dans l’organisation, avec la mise en place d’un islam moins fermé et moins rigoriste.

Les frères musulmans en Palestine

En Palestine, la diffusion des Frères musulmans est rapide dans les années 1930 et jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. A la suite de la création de l’Etat d’Israël le 14 mai 1948 et de la première guerre israélo-arabe, les territoires qui devaient constituer l’Etat arabe selon le plan de partage de l’ONU du 29 novembre 1947 passent sous domination étrangère : la Bande de Gaza administrée par l’Egypte et la Cisjordanie annexée par la Jordanie. Les Frères musulmans poursuivent leurs activités sur ces deux territoires. Lors de la guerre des six jours de juin 1967, la Bande de Gaza et la Cisjordanie sont occupées par Israël. Dans le but de combattre l’Etat hébreu, les Frères musulmans entreprennent alors de former les Palestiniens à l’Islam par le biais d’associations, de centre caritatifs et humanitaires, et de mosquées. Leur but n’est pas de défendre la cause palestinienne par la création d’un Etat, mais de faire triompher les valeurs de l’Islam parmi les Palestiniens. Mais l’action caritative et humanitaire des Frères musulmans entre en concurrence avec les actions des organisations de résistance palestinienne que sont l’OLP, le Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP) et le Front Démocratique de Libération de la Palestine (FDLP). En outre, à la différence de la résistance palestinienne, les Frères musulmans n’utilisent pas l’action politique contre Israël, restant en ce sens fidèles à la doctrine d’Hassan al-Banna. Cependant, à partir des années 1980, certains parmi les Frères décident de lutter contre Israël par des moyens politiques. Faisant scission avec les Frères musulmans, deux mouvements se créent : le Djihad islamique en 1983 et le Hamas en 1987.

Les Frères musulmans en Syrie

Les Frères musulmans se développent également dans les années 1930 en Syrie, et comme en Egypte et en Palestine, ils se font connaître par leurs réseaux sociaux et religieux. Dans les années 1950, s’ils ne participent pas à la vie politique, ils soutiennent des candidats dans leur engagement politique, qu’ils considèrent comme de « bons musulmans ». A partir de 1979, le président Hafez al-Assad est confronté à la contestation populaire, et notamment à celle des islamistes, dont les Frères musulmans, qui représentent une menace pour le pouvoir. Les revendications sont confessionnelles (le pouvoir étant aux mains des Alaouites, minoritaires, dans une population composée à 70% de sunnites), sociales (libertés démocratiques) et religieuses (la parti bass au pouvoir est laïc). Des attentats sont notamment commis en juin 1979 contre l’école d’artillerie d’Alep, dont les élèves sont Alaouites et dans d’autres villes syriennes, entre militaires alaouites et sunnites. En 1980, Alep se révolte, puis Hama en 1982. Le pouvoir syrien réprime la révolte d’Hama en février, faisant entre 5000 et 20000 morts. Les Frères musulmans sont brisés en Syrie et partent en exil.

En revanche, les Frères musulmans participent à la vie politique en Jordanie (20 sièges aux élections de 1989, 16 en 1992) et au Koweït (3 sièges au élections de 1992). Les Frères musulmans se développent également au Soudan et au Maghreb.

Bibliographie :
Caroline DONATI, L’exception syrienne, entre modernisation et résistance, La découverte, Paris, 2009, 354 pages.
Gilles KEPEL, Jihad, expansion et déclin de l’islamisme, Gallimard, Paris, 2000, 452 pages.
Aude SIGNOLES, Le Hamas au pouvoir et après ? Milan Actu, Toulouse, 2006, 112 pages.

Publié le 09/03/2010


Anne-Lucie Chaigne-Oudin est la fondatrice et la directrice de la revue en ligne Les clés du Moyen-Orient, mise en ligne en juin 2010.
Y collaborent des experts du Moyen-Orient, selon la ligne éditoriale du site : analyser les événements du Moyen-Orient en les replaçant dans leur contexte historique.
Anne-Lucie Chaigne-Oudin, Docteur en histoire de l’université Paris-IV Sorbonne, a soutenu sa thèse sous la direction du professeur Dominique Chevallier.
Elle a publié en 2006 "La France et les rivalités occidentales au Levant, Syrie Liban, 1918-1939" et en 2009 "La France dans les jeux d’influences en Syrie et au Liban, 1940-1946" aux éditions L’Harmattan. Elle est également l’auteur de nombreux articles d’histoire et d’actualité, publiés sur le Site.


 


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