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La Grande-Bretagne, le Koweït et les affaires de l’Arabie de la fin du XIX siècle à 1914 (2/5) : la Grande-Bretagne et le Koweït : l’accord secret du 23 janvier 1899

Par Yves Brillet
Publié le 08/06/2016 • modifié le 22/04/2020 • Durée de lecture : 21 minutes

Kuwait Maps. Perry Castaneda Map Collection (UT Library online)

Le 23 janvier 1899, le Cheikh du Koweït, Moubarak, et le Résident politique britannique dans le Golfe signèrent un accord secret qui donnait à Moubarak des garanties contre les objectifs possibles de la Turquie sur son territoire ainsi que contre les manœuvres cherchant à renforcer la présence et l’influence ottomanes au Koweït ; l’accord assurait à la Grande-Bretagne une position particulière. Par cet accord, Moubarak s’engageait, en son nom, et au nom de ses successeurs et héritiers, à ne pas autoriser sur son territoire la présence d’agents ou de représentants d’un Etat étranger sans la sanction préalable du gouvernement britannique. Il s’engageait en outre à ne céder, vendre, louer ou hypothéquer aucune portion de son territoire à un agent ou représentant d’un pays étranger. Cet engagement concernait également les propriétés détenues au Koweït par des ressortissants étrangers (1).

Les propos qui suivent ont pour objet de retracer la genèse de cet accord et de l’inscrire dans l’évolution de la position de la Grande-Bretagne vis-à-vis du Koweït ainsi que de mettre en perspective les objectifs des différents acteurs du processus de décision.

Quelques considérations sur position de la Grande-Bretagne vis-à-vis du Koweït dans la seconde moitié du XIXème siècle

Avant les années 1890-1899, le statut du Koweït ne posa pas véritablement de problème aux différentes autorités britanniques, qu’il s’agisse du Foreign Office, de l’India Office ou du Government of India. Une des raisons de cette relative indifférence résidait dans le fait que le Koweït se tenait relativement à l’écart des activités liées à la piraterie et au trafic d’esclaves dans le Golfe, ce qui expliquait que c’était la seule principauté d’importance avec laquelle la Grande-Bretagne n’avait pas conclu de traité (2).

En 1866, le Résident politique dans le Golfe Kemball, faisait remarquer que si le Koweït pouvait être qualifié de port libre (a free port) dont l’importance était considérable, la relation entre le Cheikh et le Sultan était de l’ordre de la subordination entre un suzerain et son vassal. Cette relation avec la Porte était de même nature que celle existant avec les chefs des grandes tribus bédouines de l’intérieur de l’Arabie ou des provinces de Damas et de Bagdad subventionnés par le pouvoir ottoman pour assurer la protection des routes et la sécurité des populations sédentaires. Il ajoute dans une note du 26 juin 1866 qu’à la différence de Bahreïn, le Koweït a toujours reconnu la suzeraineté de la Turquie et a toujours été considéré comme un territoire dépendant de l’Empire ottoman, reconnaissant cependant que la faiblesse de l’Etat suzerain garantissait au vassal une indépendance virtuelle tout en lui évitant de devoir entretenir des relations et de contracter avec des puissances étrangères (3). En 1871, dans le cadre de la tentative de reconquête du Nedjd menée par Midhat Pacha, le cheikh se rangea aux cotés des autorités ottomanes qui lui décernèrent en retour le titre de pacha et lui attribuèrent de vastes propriétés foncières dans le voisinage de la ville de Fao, propriétés qui devaient jouer un rôle éminent dans les relations futures entre le cheikh du Koweït et l’administration ottomane (4). En mai 1878, le Government of India proposa que soit reconnue l’autorité du gouvernement turc depuis la ville de Bassora sur l’ensemble du littoral du Golfe jusqu’Ojair. Il était spécifié que cette autorité s’exerçait exclusivement sur la côte et que le gouvernement britannique devait conserver toutes ses prérogatives en mer concernant la répression des actes de piraterie, y compris la possibilité de poursuivre les navires pirates jusque dans les eaux territoriales turques (5). A la suite de cette proposition, le Secrétaire aux Affaires étrangères Salisbury informa le 5 janvier 1879 l’ambassadeur britannique à Constantinople Sir Henry Layard que Londres était favorable à un arrangement avec la Turquie autorisant les navires britanniques à mener leurs opérations de répression des actes de piraterie dans la zone mentionnée ci-dessus, ce qui entrainait la reconnaissance implicite de la souveraineté territoriale turque jusque Odeid (6). En 1888, devant l’éventualité d’une expédition turque contre le sultanat d’Oman, le Foreign Office fit savoir à l’ambassadeur britannique que Londres reconnaissait les droits de la Turquie sur le littoral du Golfe jusquà la localité d’el Katif (7). Cette déclaration fut confirmée en avril 1893 par l’ambassadeur de Grande-Bretagne, Sir C. Ford, qui déclara officiellement au ministre turc des Affaires étrangères que son gouvernement reconnaissait la souveraineté de l’Empire ottoman sur les régions comprises entre Bassora et el Katif. Cette reconnaissance ne fut pas remise en cause jusque 1895 (8).

On peut ainsi conclure que ce statut ambigu du Koweït, reconnu à la fois comme entité virtuellement ou de facto indépendante et comme territoire juridiquement mais surtout officieusement dépendant ou vassal de l’Empire ottoman, constitue le cadre dans lequel la Grande-Bretagne inscrit ses relations avec la principauté jusqu’aux cinq dernières années du siècle.

Changement d’orientation et réévaluation de la position britannique : 1896-1899

De l’accession de Moubarak à la fin de l’année 1897

A partir de l’année 1896, un certain nombre de facteurs vont conduire la Grande-Bretagne à réexaminer les principes de sa politique à l’égard du Koweït, la contraignant à s’impliquer de plus en plus directement et souvent avec réticence dans les affaires de son cheikh. Cette année marque à la fois un changement notable dans l’état des relations entretenues entre la Grande-Bretagne et le Koweït et la prise de conscience par les autorités britanniques de la nécessité de clarifier la nature de ces relations.

En premier lieu, la prise du pouvoir par Moubarak après l’assassinat de son frère va en effet transformer et compliquer le rapport entre le Koweït et la Turquie, forçant ainsi la Grande-Bretagne à remettre en cause son appréciation des forces en présence.

Le pouvoir de la famille al-Sabah était établi sur le Koweït depuis 1716, date à laquelle elle quitta le Chatt el Arab et s’installa sur le littoral du Golfe dans un endroit protégé propice à la navigation. A la mort du quatrième cheikh de la famille al-Sabah, l’ainé de ses cinq fils (Mohamed, Jarrah, Moubarak, Ahmed, Jabir) lui succéda. Celui-ci semble avoir été en mauvais termes avec ses frères cadets qui conspirèrent contre lui (9). Le 17 mai 1896, Moubarak accompagné de ses fils pénétra dans les appartements de son frère et l’assassina. Le lendemain matin, lorsque les autres membres de la famille se présentèrent pour le conseil (majlis), ils eurent la surprise de trouver Moubarak à la place habituellement occupée par son frère. Lorsque l’assistance fut au complet, il annonça la mort de ce dernier et se proclama cheikh du Koweït (10). Les fils de la victime ainsi que ceux de son frère Jarrah, après être restés quelques temps au Koweït, se réfugièrent en territoire turc, dans la province d’Irak où ils reçurent le soutien de leur oncle maternel Yusuf bin Ibrahim, un riche propriétaire terrien de la province de Bassora (11). Moubarak s’empressa de prendre le contrôle des propriétés familiales à Fao, s’arrogeant ainsi l’essentiel des revenus des al-Sabah et privant de ce fait ses rivaux des moyens de financer leur opposition à l’usurpateur. Au cours de l’été 1896, il offrit 10.000 livres turques au gouverneur de Bassora, Hamdi Pacha, afin que ce dernier plaide sa cause auprès du Sultan ; il approcha directement Constantinople pour protester de sa loyauté et demander une sanction officielle de sa position au Koweït. De leur côté, ses neveux demandèrent la mise sous séquestre des récoltes de dattes, séquestre accordée par le tribunal, mais le chef du district de Fao avertit Moubarak qui envoya 500 hommes armés pour les en empêcher (12). A l’instigation de Yusuf, les habitants de la ville frontalière de Zobeir pétitionnèrent la Porte pour demander la destitution de Moubarak et l’un des fils du cheikh assassiné se tourna vers les autorités politiques britanniques dans le Golfe, demandant leur aide et leur protection (13). Ces événements conduisirent le gouvernement britannique à s’intéresser de plus près à l’évolution de la situation, et révélèrent les options divergentes entre les différents acteurs concernés. Un premier mémoire daté du 30 juin 1896 rédigé par Stravides, conseiller juridique à l’ambassade de Grande-Bretagne à Constantinople, soulignait que le Koweït était entièrement indépendant, bien que représenté sur les cartes comme faisant partie intégrante des possessions ottomanes, que la famille régnante possédait de vastes propriétés agricoles dans la province de Bassora et qu’à leur accession au pouvoir, les cheikhs acceptaient l’investiture officielle du Sultan et recevaient le titre de Qaimakam. Stavrides ajoutait que le gouvernement turc soupçonnait la Grande-Bretagne d’œuvrer à la formation d’une alliance entre les cheikhs du Koweït, de Bahreïn et les chefs arabes de l’intérieur de la péninsule ayant pour objet d’affaiblir et de s’attaquer à la présence de la Turquie dans la région (14). Ceci fut démenti le 3 octobre 1896 par le colonel Wilson, Résident politique dans le Golfe (15). Les réactions britanniques à l’établissement éventuel d’un poste de quarantaine au Koweït au début de l’année 1897 démontrèrent clairement les différentes interprétations concernant le statut du territoire. Consulté par l’India Office, le vice-roi, Lord Elgin, ne s’opposa pas au projet, considérant que la souveraineté de la Turquie sur le Koweït était établie, tandis que le Secrétaire pour l’Inde, Lord George Hamilton, marquait fermement sa désapprobation (16). Un second mémoire (Secret E. Mar 97, n°101-115) rédigé par le capitaine Whyte, ancien consul britannique à Bassora, à l’intention de l’ambassadeur Currie, vint contredire les conclusions de Stravides concernant l’indépendance du Cheikh Moubarak, se fondant sur le fait que son acceptation d’une nomination au rang de quaimakam était incompatible avec une possible reconnaissance de son indépendance par une puissance étrangère (17). Ces considérations sur le statut de Moubarak font écho aux interrogations sur la réponse à apporter aux questions liées au problème de la répression des actes de piraterie dans le Golfe suite à l’attaque par des sujets présumés de Moubarak du Haripasa, vaisseau battant pavillon des Indes britanniques. Il était en effet important de déterminer qui devait porter la responsabilité juridique pour cet acte de piraterie. Dans une dépêche à l’India Office, le Government of India fit savoir qu’il considérerait favorablement l’imputation au gouvernement turc la responsabilité des actes des ressortissants koweitiens, ce qui avait l’avantage de fixer clairement les règles et d’empêcher les acteurs (Moubarak d’une part, mais aussi la Turquie) de se réfugier derrière l’ambiguïté juridique de la situation (18). Cette prise de position entraîna une réaction du Foreign Office qui informa son ambassadeur que la Grande-Bretagne ne souhaitait pas tenir les Turcs responsables des actes de piraterie perpétrés par des ressortissants koweitiens et ainsi créer de difficultés avec la Porte, même si elle reconnaissait que Moubarak relevait de l’autorité du gouvernement ottoman (19). Le 6 avril 1897, le directeur de l’Intelligence Department à l’India Office confia au sous-secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères Godley qu’il fallait se garder d’ajouter le Koweït à la liste des responsabilités impériales britanniques (20). Le lendemain, le Foreign Office confirma la position officielle de son ministère (et de son ministre) concernant le caractère inapproprié d’un protectorat éventuel sur la partie turque du littoral du Golfe (21). Ces avis et analyses divergentes contraignirent Currie à solliciter du Foreign Office une déclaration officielle concernant la position officielle de la Grande-Bretagne vis-à-vis du Koweït. Celui-ci lui fit savoir par télégramme, le 17 juillet 1987, que le gouvernement britannique n’avait jamais admis que le Koweït était sous la protection de l’Empire ottoman, mais qu’il était pratiquement et sans aucun doute possible sous l’influence de ce dernier (22). Le Government of India était cependant enclin à reconnaitre l’autorité de la Turquie sur le Koweït afin d’obtenir satisfaction pour les actes de piraterie commis contre les navires relevant de son autorité. Un télégramme du Secrétaire d’Etat pour l’Inde daté du 23 juillet à destination du vice-roi, définit les contours et les limites de l’action britannique, stipulant que, sauf en cas d’intervention des cheikhs liés par traité avec la Grande-Bretagne ou en cas d’actes de piraterie à l’encontre de sujets ou de protégés de la Grande-Bretagne, aucune action ne saurait être envisagée. Le télégramme ajoutait que Lord Salisbury n’estimait pas devoir intervenir, position partagée par l’India Office (23). En mai 1897 cependant, sur instruction du gouvernement, et en accord avec le ministre turc des Affaires étrangères, le Résident avait été chargé de faire savoir officiellement et d’avertir Moubarak que sa responsabilité serait engagée si d’autres actes de piraterie étaient commis contre des navires sous protection britannique (24).

Il convient ici de mesurer les conséquences d’une telle démarche qui constitue une première étape dans le processus de reconnaissance officieuse d’un statut particulier pour Moubarak. Ce dernier continue à être considéré comme relevant en droit de l’Empire ottoman, mais la démarche des autorités britanniques les conduit à s’impliquer directement et à faire des affaires du Koweït un des éléments de leur politique dans le Golfe.

Moubarak et la Grande- Bretagne : à la recherche d’un protecteur

En 1905, dans un mémoire sur l’évolution de la situation, R.V. Harcourt fait remarquer que c’est en 1897 que la question du Koweït commença à prendre une tournure de plus en plus politique. En effet, Moubarak, désespérant d’obtenir une reconnaissance de son statut par la Turquie, tenta de se rapprocher de la Grande-Bretagne (25). Devant le danger constitué par son oncle Yusuf bin Ibrahim et ses neveux et considérant la précarité de sa propre situation, Moubarak fit savoir qu’il était prêt à rechercher le soutien de la Grande-Bretagne (26). Au début de l’année 1897, la Turquie avait projeté d’installer un représentant permanent à Koweït, ce qui, conjointement à sa nomination comme qaimakam et à l’utilisation du pavillon ottoman aurait constitué une confirmation de son état de subordination vis-à-vis de Constantinople (27). En mai 1897, Moubarak afficha clairement son aspiration à obtenir le soutien britannique. Le 27 juillet 1897, le Résident politique dans le Golfe télégraphia au Service diplomatique du Government of India pour les informer de cette évolution de la situation, ajoutant que, même si la menace contre le Koweït pouvait sembler exagérée, la Turquie pouvait prendre ces querelles familiales pour y accroitre son influence (28). L’arrivée en septembre 1897 d’un nouveau Résident, le major Meade, adepte d’une politique britannique plus active dans le Golfe, vint renforcer la pression sur le Government of India pour qu’il adopte une attitude moins attentiste (29). Meade confirma le 10 septembre que son adjoint Gaskin avait transmis à Moubarak la mise en garde concernant les actes de piraterie. Il ajouta que Moubarak avait informé Gaskin de sa crainte de voir la Turquie ‘absorber’ le Koweït et qu’il désirait traiter avec la Grande-Bretagne selon les termes et conditions en vigueur dans les relations entre les autorités britanniques et le cheikh de Bahreïn (30). Meade considérait qu’il y avait là matière à établir l’influence de la Grande-Bretagne, Moubarak confirmant l’absence de traité entre la Turquie et le Koweït, considérant enfin que l’Empire ottoman n’exerçait pas son droit de souveraineté et que la Grande-Bretagne n’avait pas reconnu cette souveraineté (31). Le Secrétaire d’Etat pour l’Inde fit cependant savoir que le gouvernement britannique n’était pas disposé à intervenir plus que nécessaire pour le maintien de la paix dans le Golfe et n’envisageait aucunement de mettre le Koweït sous sa protection (32). Meade précisa le 25 septembre que Moubarak, comme la plupart des cheikhs du littoral, recherchait la protection de la Grande-Bretagne ou de la Turquie suivant son intérêt du moment et que ses tentatives en direction du Government of India n’auraient pas eu lieu s’il avait obtenu la reconnaissance de Constantinople, insistant à nouveau sur le fait que l’établissement de la Grande-Bretagne au Koweït lui donnerait un avantage certain en matière de commerce et de contrôle d’éventuels termini ferroviaires (33). La réponse du Foreign Office arriva le 13 octobre ; malgré une nouvelle tentative du vice-roi le 20 octobre, Londres se refusait à toute intervention, sauf si des intérêts britanniques étaient menacés (34). A la fin de l’année, on annonça des mouvements de troupes depuis Fao vers le Koweït, dont 3 bataillons d’infanterie. Le 22 décembre, le Colonel Loch, Attaché militaire, mit en garde contre une occupation turque qui constituerait une menace pour les intérêts britanniques dans la région et renforcerait le contrôle de Constantinople sur l’ensemble du Chatt el Arab (35). Le même jour, l’India Office faisait savoir au Government of India qu’il était interdit à Meade de porter assistance à Moubarak sans une autorisation spéciale (36).

A ce stade, le statut du Koweït reste donc ambigu et son avenir incertain. Le Foreign Office et l’India Office sont majoritairement défavorables à une intervention et à la mise en place d’une politique active. Pour les autorités britanniques en Inde, les avis sont partagés ; seul le Résident politique dans le Golfe opte pour la solution radicale du protectorat. Mais de nouveaux facteurs vont obliger la Grande-Bretagne à clarifier ses choix (37).

La crainte d’une initiative russe au Koweït : le projet du Comte Kapnist

Des rumeurs avaient circulé en décembre 1897 au sujet d’un dépôt de charbon russe au port de Koweït. Le 7 février 1898, l’India Office demanda au vice-roi s’il avait confirmation d’éventuels projets russes, et le 11 février interrogea le Foreign Office pour savoir s’ils étaient en possession d’informations concernant les intentions de puissances étrangères susceptibles de justifier une inflexion de la politique de non-intervention au Koweït (38). Cette requête n’obtint pas de réponse avant le 5 décembre 1898. Londres se montrait en effet sceptique comme en témoigne un échange épistolaire entre le Secrétaire général du ministère et l’Amirauté, qui pointait l’absence d’intérêt d’un établissement au Koweït pour la Russie (39). Cette internationalisation de la question du Koweït conduisit cependant à s’interroger à nouveau sur la relation que la Grande-Bretagne devait entretenir avec la principauté. Dans une note du 23 juin 1898, le directeur du service politique de l’India Office William Lee-Warner, après avoir fait la synthèse des déclarations et décisions britanniques à propos du statut du Koweït, analysa les forces et faiblesses des positions respectives de la Turquie et de la Grande-Bretagne. L’Empire ottoman disposait de garnisons au sud de la baie de Koweït, le cheikh assassiné Mohamed avait accepté le titre de qaimakam, et utilisait le drapeau ottoman, la Grande-Bretagne n’avait pas réagi devant les menaces de Yusuf bin Ibrahim, Londres n’avait pas donné suite aux demandes de protection de Moubarak. Par contre, on pouvait avancer que la Turquie n’avait jamais exercé de souveraineté effective sur le Koweït, que Constantinople n’avait pas agi devant les actes de piraterie commis dans le voisinage du Koweït, ce qui avait conduit la Grande-Bretagne à informer officiellement Moubarak de sa responsabilité (4 mai 1897 et 4 décembre 1897). Les avantages d’un contrôle britannique sur le Koweït tenaient au fait que sa position géographique en faisait un port exceptionnel et un terminus possible pour une liaison ferroviaire. Cela mettait aussi la Grande-Bretagne en situation de surveiller le trafic d’esclaves, permettait d’exclure la Russie et de limiter les influences étrangères. Anticipant cependant les complications diplomatiques avec la Turquie, Lee-Warner conseillait d’orienter l’action de la Grande-Bretagne vers la rive perse du Golfe (40).

L’annonce au mois de juillet 1898 qu’un groupe financier russe emmené par le Comte Kapnist, neveu de l’ambassadeur de Russie à Vienne, cherchait à obtenir une concession pour une liaison ferroviaire entre Tripoli sur la côte syrienne et le Koweït exacerba les craintes britanniques, provoquant un changement radical de la position de Lee-Warner (41). D’après les informations disponibles en juillet 1898, bien que le projet ait reçu le soutien de l’Ambassade de Russie à Constantinople, l’ambassadeur lui-même n’était pas particulièrement impliqué dans le projet et il semblait que la préférence de Witte, ministre des Finances du tsar, allait à une ligne reliant la mer Caspienne au Golfe (42). La demande de concession stipulait que le gouvernement ottoman garantissait un retour de 6% sur le capital investi, accordait un droit de recherche et d’exploitation des ressources minières le long de la ligne (zone exclusive de 50 miles), ainsi qu’un monopole des travaux d’irrigation dans les vallées du Tigre, de l’Euphrate et du Chatt el Arab. L’ensemble du projet nécessitait une mise de fonds de 30 millions de livres (43). Kapnist s’était rapproché de financiers français et de la maison londonienne Williams, Meyers and Co, pour obtenir leur concours. Ces derniers ne s’étaient pas montrés défavorables au projet mais, en raison des implications politiques prévisibles, avaient demandé le sentiment du Foreign Office concernant les problèmes liés à la répartition des sièges au conseil de direction de l’entreprise et à la pertinence d’une participation britannique (44). Le 19 novembre 1898, Curzon, à la veille de rejoindre son poste de vice-roi, fit parvenir à Salisbury un mémoire dans lequel il détaillait les conséquences éventuelles pour la Grande-Bretagne de l’installation d’une puissance étrangère dans le Golfe (45). Le mémoire insistait sur le développement des activités étrangères, notamment allemandes dans la région de Bassora et mettait en garde contre les conséquences diplomatiques et stratégiques du projet Kapnist. Selon Curzon en effet, la Grande-Bretagne ne pouvait accepter l’octroi d’une concession à Kapnist parce que cela impliquait la reconnaissance de fait de la souveraineté de la Turquie sur le Koweït, et que rien n’empêchait cette dernière de céder éventuellement ses droits à d’autres puissances. Il se prononçait en conséquence pour l’établissement d’un protectorat britannique sur le Koweït (46). Le 28 novembre, à la demande de Salisbury, le directeur du renseignement militaire Sir J.C. Ardagh émit des doutes quant aux intentions des promoteurs du projet, estimant que leur objectif véritable était plutôt de permettre à la Russie en tant que puissance de s’établir sur les rives de l’Euphrate et du Tigre (47). Devant l’accélération de l’évolution de la situation, l’India Office se tourna le 22 novembre vers le Foreign Office, rappelant les points évoqués dans la correspondance du 11 février. En réponse, le Foreign Office lui fit savoir le 5 décembre qu’il était disposé à lui apporter son soutien diplomatique dans l’éventualité où le Government of India estimerait qu’un protectorat sur le Koweït pouvait être établi sous sa propre responsabilité et sans que cela se traduise par une extension des opérations de police dans le Golfe (48). Le successeur de Currie à Constantinople, Sir Nicolas O’Conor, émit cependant des réserves concernant l’opportunité d’une déclaration officielle d’un protectorat sur le Koweït, conseillant de procéder de la manière la plus discrète possible (49). Il estimait néanmoins que les actes de piraterie pouvaient justifier l’intervention directe du Government of India, sous la forme d’un accord spécial et non déclaré avec Moubarak (50). Le 24, Kapnist fut convoqué au ministère des Travaux publics et reçu le décret impérial confirmant la concession, ce qui fut confirmé le 31 par O’Conor. Le 30, le Résident politique Meade demanda à être autorisé à se rendre à Koweït, préalablement à la conclusion officielle du protectorat, et à proposer un accord secret à Moubarak qui s’engagerait à ne traiter avec aucune autre puissance. Il suggérait en retour d’être autorisé à lui promettre le concours de la Grande-Bretagne contre toute attaque extérieure. Une fois l’accord de protectorat signé, il demandait le renforcement des forces navales britanniques dans le Golfe (51). Le Foreign Office suivit cependant les recommandations d’O’Conor ; le 4 janvier 1899, le Secrétaire général du ministère informait Lee-Warner qu’il serait avisé d’obtenir de Moubarak un accord de non cession. L’intérêt pour Salisbury résidait dans le fait qu’une clause de non-aliénation n’impliquait pas un protectorat formel sur le Koweït (52). Le Government of India fut informé en ce sens le 6 janvier, et ordonna à son Résident de procéder vers le Koweït où il arriva le 22 janvier. L’accord secret fut signé le lendemain selon les termes dictés par Salisbury (53).

L’accord secret du 23 janvier 1899 fournit à la Grande-Bretagne l’outil lui permettant de contrôler l’évolution de la situation dans le Golfe à partir du Koweït. Quelques années plus tard, le successeur de Salisbury au Foreign Office devait le qualifier de « bedrock of our policy in the Gulf. » Cet accord a minima allait en deçà de ce qu’aurait voulu Curzon. Mais dans une correspondance privée Godley, Secrétaire général de l’India Office devait résumer la question ainsi : « We don’t want Kuwait, but we don’t want anyone else to have it. »

Lire les autres parties :

La Grande-Bretagne, le Koweït et les affaires de l’Arabie de la fin du XIX siècle à 1914. Première partie : le cadre général de l’action de la Grande-Bretagne dans le Golfe Persique. Le Koweït : situation géographique, limites territoriales et importance stratégique

La Grande-Bretagne, le Koweït et les Affaires de l’Arabie de la fin du XIX siècle à 1914. Troisième Partie : le train de Bagdad et la diplomatie des puissances, 1900-1903. De l’année 1900 au retrait de la Grande-Bretagne du projet de liaison ferroviaire

La Grande-Bretagne, le Koweït et les Affaires d’Arabie de la fin du XIX siècle à 1914. Quatrième partie. Le train de Bagdad et la diplomatie des puissances. De la rupture des négociations en 1903 à l’accord anglo-turc de 1913 (1/2)

La Grande-Bretagne, le Koweït et les Affaires d’Arabie de la fin du XIX siècle à 1914. Quatrième partie. Le train de Bagdad et la diplomatie des puissances. De la rupture des négociations en 1903 à l’accord anglo-turc de 1913 (2/2)

La Grande-Bretagne, le Koweït et les Affaires de l’Arabie de la fin du XIX siècle à 1914. Cinquième Partie : les Affaires de l’Arabie (1/2)

La Grande-Bretagne, le Koweït et les Affaires de l’Arabie de la fin du XIXe siècle à 1914. Cinquième Partie : les Affaires de l’Arabie (2/2)

Notes :

(1) Agreement between the British Government and the Sheikh of Kuwait, 23 January 1899, dans The Kuwait Crisis : Basic Documents, edited by E. Lauderpacht, C.J. Greenwood, Marc Weller and David Bethlehem, Cambridge Grotius Publications Limited, 1991, p.8.
(2) J.B. Kelly, The Legal and Historical Basis of the British position in the Persian Gulf, St Antony’s Papers n°4, Middle Eastern Affairs, vol 1, Londres, 1958, pp.119-140, p. 135.
Dans l’avant-propos du Persian Gulf Gazetteer, Historical and Political Materials, 1896-1904, Précis of Kuwait Affairs, IOR/L/PS/20/ C239, on peut lire : “Kowait has been drawn into the vortex of the Persian Gulf Politics only since 1896, when its late Sheihk Mohamed was murdered.”
(3) Précis of Kuwait Affairs, §9-12, Kemball, Lettre n° 13, 18 avril 1866 et n° 56, 26 juin 1866.
(4) Ibid., § 12.
(5) Ibid., § 13 : “The authority of the Porte should be recognized as established on land but that at sea the British Government should continue to exercise some concurrent Protectorate, pursuing pirates if necessary into Turkish territorial waters.”
(6) Ibid., §14.
(7) Persian Gulf Précis, (part 1&2), IOR/L/PS/20/C250, § 6 : “Our position is clearly defined. We recognize Turkish jurisdiction as far as Katif and are anxious that it should be effectively exercised within these limits.”
(8) Ibid., §7. On peut aussi se reporter à la Note on Kuwait by L.W. Warner, 23 juin 1898, Précis of Kuwait Affairs, Appendix C, p.94. Celui-ci fait référence à la note du 3 février 1880 à Layard reconnaissant l’autorité de la Turquie ‘where firmly established on the coast.’
(9) Koweit, A Report Compiled in the Intelligence Branch, Quatermaster’s General Department, 1903, IOR/L/PS/20/153, p.3 Au moment de la compilation de ce rapport (1903), l’auteur décrit Moubarak, alors âgé de 59 ans comme “a tall, dignified man, almost a typical Patriarch, good looking too, in spite of being marked by small-pox ; while his keen black eyes show marked intelligence, as well as considerable amount of astuteness.”
(10) Salwa Alghanim, The Reign of Mubarak al-Sabah, Sheikh of Kuwait, 1896-1915, I.B. Tauris, Londres, 1990, pp.235, p.1.
(11) Lorimer, Gazetteer of the Persian Gulf, vol.1, part 2, p 1017.
(12) Salwa Alghanim, p.34.
(13) Lorimer, Gazetteer of the Persian Gulf, vol.1, part 2, p.1018.
(14) Persian Gulf Précis, (Part1&2), IOR/L/PS/20/C250, §8, p.22.
(15) Persian Gulf Gazetteer, Historical and Political Materials, Précis of Kuwait Affairs, 1896-1904, IOR/L/PS/20/C239, § 20 : “The story as gathered by Mr Stravides is, as regards this Residency, not only absolutely without foundation, but ludicrously improbable and incongruous on the face of it (…). There is no information whatever in this Residency of any proposed alliance of the Koweit Sheikhs, Ibn Rashid and Jasim bin Thani.”
(16) Ibid., §21-22, India Office, 12-02-1897 : “As regards Kuwait, Sir Philip Currie’s letter of 24/11/1896 as well as memorandum by Mr Stavrides, dated June 1896, hardly support the Turkish claim to a protectorate, and Lord Hamilton is therefore to this extent unable to acquiesce in the view put forward in Viceroy’s telegram.”
(17) Persian Gulf Précis, § 8, p.22, Memorandum to Sir Philip Currie, 22/03/1897.
(18) Précis of Kuwait Affairs, § 24 : “A state of Affairs in which he can shelter himself under a nominal subjection to the Porte while the Porte can disclaim at will any responsibility is in the last degree satisfactory.”
(19) Briton Cooper Busch, Britain and the Persian Gulf, 1894-1914, University of California Press, 1967, pp. 432, p. 99, Salisbury to Currie, April 2, 1897.
(20) Ibid., p.99, Lee-Warner to Godley : “As we seem inclined to regard Koweit as outside our sphere of influence (…), I think our officers had better stand aloof.”
(21) Ibid., p.100, Minute on I.O. to F.O., April 7, 1897 : “I took upon myself to say that however this (the independence of Mubarak) might be, I felt pretty sure that you would object to our assuming fresh protectorates and responsibilities on the mainland on the Turkish side of the Persian Gulf. Bahrein gives us trouble enough, but it is an island. But to have constant squabbles with the Turks about the adjoining coast tribes would be intolerable, unless we were prepared to establish a military post there.”
(22) Persian Gulf Précis, (Part1&2), IOR/L/PS/20/C250, § 8, p.22 : “HMG have never admitted that Kuwait is under the protection of the Turkish Government. But since it is practically under Turkish influence, it is doubtful whether we could deny the latter.”
(23) Précis of Kuwait Affairs, IOR/L/PS/20/C239, § 22.
(24) Lorimer, Persian Gulf Gazetteer, vol.1, part 2, p.1021.
(25) Memorandum respecting Kuwait, December 1905, IOR/L/PS/20/B113A.
(26) Briton Cooper Busch, p.100.
(27) Salwa Alghanim, p.1.
(28) Précis of Kuwait Affairs, IOR/L/PS/20/C239.
(29) Briton Cooper Busch, p.100.
(30) Persian Gulf Précis, IOR/L/PS/20/C250, §9, p.14 : “Sheikh Mubarak, despairing of obtaining from Turkey a recognition of his independence, had preferred a definite request for British protection, on the same terms as the Bahrein and Trucial Chiefs, alleging that Turkey intended to absorb Kuwait.”
(31) Précis of Kuwait Affairs, IOR/L/PS/20/C239, §35 : “Unless therefore we are prepared to allow Turkey to absorb Koweit, I strongly advice that I may be permitted to proceed further with negotiations.”
(32) Persian Gulf Précis, IOR/L/PS/20/C250, §10, p.14.
(33) Précis of Kuwait Affairs, IOR/L/PS/20/C239, § 36 : Letter n° 90, 25 Sept. 1897 : “Kuwait possesses an excellent harbour and will, under our protection, undoubtedly become one of the most important places in the Persian Gulf. Apart from the chances of being the seaport for the projected railway from Port Said, which is under consideration, and which the possession of Koweit would enable us to protect, the trade with the interior is already considerable.”
(34) Ibid., India Office to Government of India, 30 October 1897.
(35) Ibid., § 46-47.
(36) Ibid., § 48.
(37) Voir à cet égard Busch, p.103.
(38) Précis of Kuwait Affairs, IOR/L/PS/20/C239, § 46-49.
(39) Busch, p.104, Beaumont to Sanderson, 18 février 1898 : “Kuwait is a good harbour, but it is on the verge of nowhere and I cannot conceive why the Russians would desire to have it.” Il ajoutait cependant que “If, however Russia ever descends through Persia to establish herself on the shores of the Gulf, Koweit would be the natural port for any ship which she might let into the Gulf.”
(40) Précis of Kuwait Affairs, IOR/L/PS/20/C239. Appendix C, Note on Kuwait by W. Lee- Warner, 23 juin 1898.
(41) Busch, p.105 : “I wish we had secured Koweit a year ago.”
(42) Précis of Correspondence on International Rivalry and British Policy in the Persian Gulf. 1872-1905, IOR/L/PS/20/C247, §13-14.
(43) Ravinder Kumar, India and the Persian Gulf Region, 1858-1907. A study in British Imperial Policy, Londres, 1966, pp.259, p. 142.
(44) Ravinder Kumar, p. 143, Memorandum on Kapnist Scheme by Messrs Williams, Meyers and Co. 25 Oct 1898 : “If British capital were discouraged from participating in the project, the abandoned opportunity would be eagerly seized by financial groups of another nationality, anxious for political as well as financial reasons to acquire increased influence in the country.”
(45) Memorandum by G.N. Curzon, 19 Nov 1898, (I. O.), Political and Secret, Home Correspondence, vol. 180, cité dans J. B. Kelly, Salisbury, Curzon and the Secret Agreement of 1899, Studies in International History : Essays presented to W.C. Medlicott, eds K. Bourne and W.C. Watt, Londres, 1967.
(46) Ibid. : “A Russian railway ending at Kuwait would be in the highest degree injurious to British interests. A German railway to Kuwait would be scarcely less so, even a Turkish railway to Kuwait would be unwelcome.”
(47) J.B. Kelly, p.269, Memorandum by Ardagh, 28 Nov.1898, secret, enclosed in Ardagh to Sanderson, War Office, 29 Nov. 1898 : “to create an opportunity for the State financiers of that country to acquire predominant influence in the basins of the Tiger and the Euphrates, with a view to their inheritance.”
(48) Précis of Kuwait Affairs, IOR/L/PS/20/C250, §51. Notification au Government of India le 24 décembre.
(49) Busch, p.107 : “Any formal declaration to this effect at the present moment would be considered little short of a hostile act by Turkey, and, in any case, it would be sure to produce very serious diplomatic complication, not only with this Government but also with Russia.” (22 décembre 1898).
(50) Persian Gulf Précis, IOR/L/PS/20/C250, §10.
(51) Précis of Kuwait Affairs, IOR/L/PS/20/C239, §54.
(52) Ibid., §58 : “Lord Salisbury concurs in the opinion of O’Conor as to the expediency of avoiding at present overt step towards establishing protectorate but desires to take precaution against any Russian territorial claims, which may possibly result from Kapnist Railway Concession. He therefore proposes immediate steps to take arrangemenyt from the Sheihk of Koweit not to cede, lease, mortgage, or otherwise alienate or give for occupation any portion of his territory to the Government or subject to any other power without obtaining consent of HMG previously.”
(53) Pour le texte complet de l’accord, voir The Kuwait Crisis, Basic Documents.

Publié le 08/06/2016


Yves Brillet est ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure de Saint Cloud, agrégé d’Anglais et docteur en études anglophones. Sa thèse, sous la direction de Jean- François Gournay (Lille 3), a porté sur L’élaboration de la politique étrangère britannique au Proche et Moyen-Orient à la fin du XIX siècle et au début du XXème.
Il a obtenu la qualification aux fonctions de Maître de Conférence, CNU 11 section, a été membre du Jury du CAPES d’anglais (2004-2007). Il enseigne l’anglais dans les classes post-bac du Lycée Blaringhem à Béthune.


 


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