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La bande de Gaza (2/2) : le dispositif de contrôle israélien

Par Laura Monfleur
Publié le 03/08/2018 • modifié le 08/10/2023 • Durée de lecture : 3 minutes

L’occupation de la bande de Gaza

Israël a occupé la bande de Gaza en 1948, en 1956 à la suite de la crise du canal de Suez, puis en 1967 après la guerre des six jours. Des colonies israéliennes se sont développées principalement dans le Sud et dans le Nord de la bande de Gaza. Ce développement urbain s’est accompagné de la destruction de villages et de parcelles agricoles palestiniennes. Entre le 29 septembre 2000 et le 14 février 2001, dans la bande Gaza, 7000 dunums (1) ont été rasées dont 80% étaient des parcelles cultivées (Pirinoli, 2005). Pour Christine Pirinoli (2005), la confiscation des terres, la destruction de bâtiments ou de parcelles palestiniens permettent un contrôle du territoire mais également l’imposition d’un projet politique en oblitérant les lieux qui signifient le passé arabe de la région et en considérant que la bande de Gaza est une terre sans peuple.

Les dispositifs du blocus

Depuis 2005, Israël s’est retiré de la bande de Gaza et les colonies juives ont été démantelées. Or, pour certains chercheurs, Israël mène depuis 2005 une occupation d’un « nouveau genre », celle du blocus et du siège (Filiu, 2014). En effet, depuis 2007, les frontières de la bande de Gaza avec l’Egypte et Israël ont été progressivement fermées. La frontière avec Israël est constituée d’un mur de clôture et d’une zone de no man’s land du côté palestinien où il est interdit de s’y rendre (cf. carte). Les points de passage utilisés par les Palestiniens pour aller travailler en Israël avant 2007 sont continuellement ou ponctuellement fermés. Toute migration est interdite. Le blocus concerne également l’espace aérien et les eaux territoriales où la présence des forces militaires israéliennes est importante. Les eaux territoriales appartenant à la bande de Gaza sont limitées par Israël à quelques miles nautiques, moins que les limites fixées par la communauté nationale (Filiu, 2014). La bande de Gaza est une enclave territoriale et connaît une marginalisation géographique mais également économique du fait du blocus commercial. Le Hamas a néanmoins développé des tunnels de contrebande vers le Sinaï.

Israël souhaite contenir le pouvoir du Hamas à la seule bande de Gaza et tente de faire plier cette organisation en étouffant notamment son économie. Elle aurait construit des tunnels vers le territoire israélien pour laisser entrer des combattants. Le blocus est donc le moyen d’assurer la souveraineté et la défense de l’intégrité du territoire israélien (Parizot, 2009b). Or, pour Jean-Pierre Filiu (2014), le blocus a plutôt favorisé le Hamas. En effet, le blocus permet un encadrement important de la population : cette dernière ne peut quitter le territoire gazaoui, les produits de contrebande sont aux mains du Hamas comme les produits de construction mais aussi le papier. Le Hamas détient ainsi le seul journal officiel (Filiu, 2014).

Les opérations militaires israéliennes

Selon Jean-Pierre Filiu (2014), ce blocus a également favorisé l’escalade militaire entre Tsahal et le Hamas. Les opérations militaires israéliennes sont fréquentes dans la bande de Gaza : opération « Plomb durci » entre décembre 2008 et janvier 2009 (Géostratos, 2009), opération « Pilier de Défense » en novembre 2012, opération « Barrière protectrice » en juillet et août 2014. Ces opérations aériennes parfois associées à des offensives terrestres, visent à détruire les tunnels du Hamas mais également leurs sièges et leurs installations dans les différents espaces urbains de la bande de Gaza (cf. carte). Mais si ces opérations ont une visée militaire stratégique, elles touchent également les populations et les installations civiles.

Elles répondent parfois à des attaques de roquette du Hamas dans les villes israéliennes. En effet, le Hamas a progressivement abandonné les attentats kamikazes pour se concentrer sur les attaques de roquette. Certaines roquettes de plus longue portée auraient été ainsi fournies par l’Iran via les tunnels entre Gaza et le Sinaï et ont atteint des villes telles que Tel Aviv, Jérusalem ou Haifa. Israël estimait ainsi que le Hamas disposait de 6000 roquettes à la veille de l’opération « Barrière Protectrice » (Samaan, 2015). Depuis 2007, Israël a développé un programme antimissile, le Dôme de Fer qui s’appuie sur trois composantes : un radar de détection des missiles, une unité de lancement de missile et un centre de contrôle (Samaan, 2015). Développé face à la menace du Hezbollah au Liban, ce programme antimissile est surtout aujourd’hui mis en place dans les villes du Sud du territoire israélien et vise donc à réduire la menace des roquettes venant de Gaza (Samaan, 2015).

Lire la partie 1

Note :
(1) Un dunum équivaut à environ 1000 m2.

Bibliographie
FILIU J.-P. 2014 « Gaza : la victoire en trompe l’œil du Hamas », Le Débat, n°182, p. 59-67.
FILIU J.-P., 2018, « Gaza, toujours au cœur de la Palestine », Le Monde blog, http://filiu.blog.lemonde.fr/2018/04/08/gaza-toujours-au-coeur-de-la-palestine.
GEOSTRATOS, 2009, « Analyse succincte de l’opération « Plomb durci » 27 décembre 2008- 18 janvier 2009 », Outre-Terre, Vol. 2, n°22, p. 85-97.
Les décodeurs, Le Monde, 2014, « Comprendre la géographie de Gaza en une carte », https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/visuel/2014/07/28/gaza-geographie-d-une-enclave-etranglee_4463949_4355770.html.
PARIZOT C., 2009a, « Séparation et régime de mobilité entre Israël et la Cisjordanie (2000-2009) : Réglementations, pratiques et acteurs », Colloque « Israël-Palestine : état des lieux », 6-7 avril 2009, Paris.
PARIZOT C., 2009b, « Après le mur : les représentations israéliennes de la séparation avec les Palestiniens », Cultures et Conflits, n°73, p. 53-72.
PIRINOLI C., 2005, « Effacer la Palestine pour construire Israël. Transformation du paysage et enracinement des identités nationales », Etudes rurales, n°173-174.
SAMAAN J.-L., 2015, « Défense antimissile israélienne et logique de prolifération au Moyen-Orient », Stratégique, Vol. 1, n°108, p. 95-107.

Publié le 03/08/2018


Elève en géographie à l’Ecole Normale Supérieure et diplômée d’un master de recherche en géographie, Laura Monfleur s’intéresse aux espaces publics au Moyen-Orient, notamment les questions de contrôle des espaces et des populations et de spatialité des pratiques politiques et sociales. Elle a travaillé en particulier sur Le Caire post révolutionnaire et sur les manifestations des étudiants à Amman.
Elle travaille pour la rubrique cartographique des Clés du Moyen-Orient.


 


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