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Le rôle de la Turquie et de la question kurde dans les conflits irakiens et syriens. Partie II : Ankara face à l’Etat islamique

Par Simon Fauret
Publié le 08/06/2015 • modifié le 01/03/2018 • Durée de lecture : 13 minutes

Turkish soldiers in a tank observe the Syrian town of Ain al-Arab, known as Kobane by the Kurds, from a hill at the Turkish-Syrian border, in the southeastern Turkish village of Mursitpinar, Sanliurfa province, on October 9, 2014. Advancing Islamic State (IS) fighters seized control of a third of the Syrian border town of Kobane on October 9, as Turkey rejected sending in troops on its own against the jihadists. Despite intensified US-led air strikes, IS militants captured more ground in overnight fighting that left dozens dead, as calls grew for ground action to support Kobane’s beleaguered Kurdish defenders.

AFP PHOTO / ARIS MESSINIS

Depuis la proclamation à l’été 2014 d’un « califat » à cheval entre l’Irak et la Syrie, l’organisation terroriste n’a cessé d’étendre son territoire au point d’atteindre par endroits la frontière turque. Directement concernée par l’afflux massif de réfugiés fuyant l’Etat islamique (EI), la Turquie a pourtant longtemps hésité avant de réagir. Officiellement, elle a souvent justifié son attentisme en déclarant se concentrer sur son objectif prioritaire : la chute du régime de Bachar el-Assad [2].

S’il est vrai que l’administration Erdogan, comme la première partie de l’article l’a évoqué, a très peu de sympathie pour le gouvernement syrien, cela ne peut suffire à comprendre son attitude. En effet, la question kurde, tout comme dans le cas du conflit syrien, doit également être prise en compte dans l’analyse de la position turque. La crainte du PKK et de ses affiliés syriens du PYD, amenés à combattre l’Etat islamique, a placé la Turquie devant un dilemme : peut-elle lutter contre les djihadistes sans renforcer involontairement l’organisation kurde ?

Lire la première partie de l’article : Le rôle de la Turquie et de la question kurde dans les conflits irakiens et syriens. Partie I : Ankara face à Damas

L’expansion de l’Etat islamique, l’ambiguïté de la position turque et ses limites

Depuis 2011, la Turquie soutient les opposants au gouvernement syrien. Pour sa part, l’Etat islamique, qui essaie de consolider son implantation en Syrie en profitant du chaos dû à la guerre civile, a été amené à plusieurs reprises à combattre les forces d’el-Assad. A l’été 2014, l’organisation terroriste s’empare notamment d’une importante base de l’armée syrienne dans le nord du pays [3]. Parallèlement, en poursuivant son objectif d’expansion territoriale, l’EI pénètre dans les régions à majorité kurde en Irak et en Syrie. En septembre 2014, les djihadistes commencent ainsi à assiéger Kobanê, une ville à la frontière turco-syrienne qui abrite le quartier-général des Unités de Protection du Peuple (YPG), les combattants du PYD [4].
A premier abord, Ankara et les djihadistes sembleraient avoir deux adversaires en commun : le régime syrien et le PYD. Néanmoins, l’Etat islamique ne partage les mêmes ennemis que la Turquie que par un concours de circonstance. Le leader de l’EI, Abu Bakr al-Baghdadi, combat en effet ceux qui gênent ou ralentissent la progression territoriale de son organisation. Si les Kurdes et le régime d’el-Assad rentrent dans cette catégorie, les rebelles syriens sont également concernés. Début janvier 2014, l’Etat islamique attaque la ville d’Atareb, au nord de la Syrie, jusque-là tenue par l’Armée Syrienne Libre, la principale force de l’opposition modérée [5]. En réaction, différentes factions rebelles ouvrent le feu sur des positions de l’organisation d’al-Baghdadi [6], qui ne tarde pas à se venger en fomentant un attentat à la voiture piégée (31 morts) [7]. A partir de ce début d’année 2014, la guerre est déclarée entre l’opposition syrienne et l’Etat islamique. Entre avril et juillet 2014, ce dernier va conquérir la quasi-totalité du gouvernorat de Deir-ez-Zor, à l’est de la Syrie, que les rebelles étaient parvenus à reprendre des mains de l’armée d’el-Assad [8].

Dans les premiers mois de 2014, le gouvernement turc semble prendre conscience de la menace que fait peser al-Baghdadi sur les intérêts turcs. En janvier, à la frontière turco-syrienne, l’EI ouvre le feu sur deux véhicules de l’armée turque qui réagit immédiatement en détruisant un convoi des djihadistes [9]. En mars, la police arrête trois militants de l’EI ayant attaqué un poste de contrôle turc [10]. Ankara n’envoie en effet ces messages de fermeté que si ses intérêts sont directement menacés. Son positionnement serait, semble-il, plutôt que la lutte contre l’Etat islamique, la défense du territoire national.
La porosité des frontières turco-syrienne et turco-irakienne illustrerait d’ailleurs également le pragmatisme d’Ankara. L’EI peut notamment vendre son pétrole sur le marché noir turc sans que l’administration ne tente d’enrayer la contrebande [11]. Si la population turque, confrontée à un prix de l’essence élevé, perçoit comme une aubaine ce marché parallèle où le litre d’essence est à moitié prix, les recettes des ventes de pétrole syrien et irakien permettent à l’Etat islamique de financer ses efforts de guerre [12].
La Turquie a en outre souvent été accusée d’être une plateforme de passage pour les djihadistes désirant s’engager dans l’organisation d’Al-Baghdadi [13]. En août 2014, le Washington Post parvient à interviewer un membre de l’Etat islamique : « la plupart des combattants qui nous ont rejoint depuis le début de la guerre sont venus de la Turquie, tout comme nos armes et notre équipement » [14]. Kadri Gursel, un journaliste d’Al-Monitor, désignait en juin 2014 la frontière turque comme une « autoroute du djihad » [15]. Reyhanli, ville turque située à la frontière avec la Syrie, serait en l’occurrence devenue un « centre commercial » pour les terroristes qui s’approvisionnent en toute impunité et sans être inquiétés par les forces de l’ordre [16].

Cependant, plusieurs événements semblent prouver à l’administration Erdogan que la Turquie ne pouvait être durablement épargnée par les actes des djihadistes. En effet, tout d’abord, l’organisation d’Al-Baghdadi, selon Romain Caillet chercheur à l’Institut français du Proche-Orient, dit mépriser le gouvernement turc et dit le percevoir comme un « apostat » [ayant renoncé publiquement à sa religion] [17]. Al-Baghdadi, surtout après avoir proclamé le rétablissement du califat à l’été 2014, juge que son organisation est la seule légitime pour représenter la communauté des musulmans.
Ensuite, la Turquie, comme la plupart des acteurs de la région, se trouve très tôt confrontée aux actes des djihadistes. Ainsi, en mai 2013, deux attentats à la voiture piégée tuent plus de 50 personnes dans la ville turque de Reyhanli, à la frontière syrienne. Le gouvernement turc a directement accusé le régime syrien de les avoir fomentés [18]. Pourtant, une enquête a révélé que l’Etat islamique, à cette date encore rattaché à Al-Qaida, était lié à l’organisation des attentats [19].
La Turquie dispose d’autre part d’une enclave territoriale sur le sol syrien, à 15 kilomètres de la frontière turque. Abritant le tombeau de Suleiman Chah, un ancêtre du fondateur de l’Empire ottoman, l’enclave a été concernée par l’avancée de l’Etat islamique dans les premiers mois de l’année 2014. Le 21 mars 2014, une vidéo montrait des membres de l’organisation menaçant Ankara d’attaquer le tombeau si les forces turques n’abandonnaient pas rapidement les lieux [20]. Bien qu’aucune attaque n’ait fait suite à la menace, la Turquie semble avoir pris conscience du danger, d’autant plus que seuls 15 soldats gardaient le site historique.
A l’instar des pays ouvertement en lutte contre l’Etat islamique, la Turquie fait également l’expérience des prises d’otages. En septembre 2014, elle est contrainte de négocier le retour de 49 otages turcs capturés trois mois plus tôt contre la libération de 180 membres de l’EI emprisonnés en Turquie [21].

Pourtant, à partir de septembre 2014 et du début de la bataille de Kobanê, Ankara va montrer sa réticence à combattre les terroristes alors même que ces derniers semblent préparer le massacre des habitants kurdes de la ville.

La bataille de Kobanê

Le 13 septembre 2014, l’Etat islamique lance une offensive sur la ville de Kobanê, au nord de la Syrie, dans une région à majorité kurde. Le contrôle de cette localité lui permettrait de relier plus rapidement Rakka, sa capitale, et Alep, et d’exporter plus facilement le pétrole de contrebande vers la Turquie [22]. Les Unités de Protection du Peuple, branche armée du PYD, s’organisent pour empêcher la prise de la ville. A défaut de pouvoir s’emparer immédiatement de Kobanê, les djihadistes prennent le contrôle de 350 villages de sa banlieue [23] et l’encerclent petit à petit. Plus de 300 000 Kurdes fuient vers la Turquie [24]. Selon un membre du Gouvernement Régional du Kurdistan irakien (GRK), ce sont 12 000 civils qui se retrouvent enfermés dans la ville assiégée par plus de 9000 combattants de l’Etat islamique [25]. Enfin, le 6 octobre, les djihadistes pénètrent dans les rues de Kobanê [26].

Le 2 octobre, le Parlement turc créé un cadre légal autorisant le gouvernement, s’il le souhaite, à envoyer des troupes en Syrie et en Irak afin d’intervenir contre l’Etat islamique ou tout autre organisation terroriste [27]. Cependant, Ankara maintient une position de neutralité défensive. Des chars turcs sont envoyés à la frontière, et observent la situation à Kobanê, à quelques centaines de mètres, sans agir [28]. Dans la première moitié du mois d’octobre 2014, le gouvernement turc enchaîne les déclarations contradictoires. Erdogan, lors d’une visite début octobre à Gazantiep, dans un camp de réfugiés syriens, affirme que « la terreur ne sera pas stoppée tant que nous ne coopérerons pas en vue d’une opération terrestre [29] ».

Or, quelques jours plus tard, le ministre des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu, après s’être entretenu avec le secrétaire de l’OTAN Jens Stoltenberg, estime que planifier une opération terrestre dirigée par la Turquie n’est pas réaliste [30]. Le Premier ministre Ahmet Davutoglu explique quant à lui que si le gouvernement turc refuse à ses ressortissants kurdes d’aller combattre en Syrie contre l’EI, c’est parce qu’elle ne veut pas mettre en danger ses citoyens en les laissant participer à un conflit étranger [31]. Enfin, alors que Yasin Aktay, un cadre de l’AKP, juge que la bataille de Kobanê n’était qu’un affrontement entre « deux organisations terroristes » (le PYD/PKK et l’EI) [32], Erdogan déclare que le siège de la ville ne concerne pas la Turquie [33].

En tant que membre de l’OTAN, la Turquie ne peut certes pas attendre de manière passive la chute de Kobanê aux mains de l’EI. Elle se doit de donner des garanties à ses alliés au sein de la coalition contre l’organisation d’al-Baghdadi. Cependant, elle retarde le plus possible un engagement plus direct en imposant ses conditions. Ainsi, Ankara se montre intransigeant et exige l’établissement d’une zone d’exclusion aérienne à la frontière turco-syrienne comme un préalable à une participation plus active des forces turques à la coalition anti-EI.

Une partie non négligeable des Kurdes turcs, excédés par l’attentisme de leur gouvernement par rapport au siège, s’interrogent : l’administration Erdogan préfèrerait-elle voir flotter à Kobanê le drapeau de l’Etat islamique plutôt que celui du PYD ? Des manifestations de soutien aux Kurdes de Kobanê se multiplient dans plusieurs villes turques et dénoncent l’attitude d’Ankara. En octobre, plus de 30 manifestants sont tués dans des affrontements avec les forces de l’ordre turques [34]. La répression n’empêche pas plusieurs milliers de personnes de se rendre dans les rues le 1er novembre en proclamant un jour de solidarité pour les résistants de Kobanê [35]. Le 13 octobre 2014, l’aviation turque bombarde des positions du PKK non loin de Diyarbakir, la capitale de la région à majorité kurde de la Turquie. Cette frappe aérienne contre le PKK est la première depuis deux ans de pourparlers de paix entre l’organisation kurde et Ankara. Selon l’armée turque, le bombardement n’est qu’une réponse à l’attaque de postes militaires par des militants du PKK [36]. La bataille de Kobanê réactive et cristallise donc, au-delà de la frontière turco-syrienne, l’antagonisme de l’administration Erdogan et de la guérilla kurde.

Qu’en est-il du point de vue de l’Etat islamique ? Kobanê constitue pour le groupe d’al-Baghdadi un enjeu stratégique crucial. Cependant, à l’instar d’Ankara, le fait que les résistants au siège soient des membres du PYD et du PKK ne laisse pas l’EI indifférent. L’Etat islamique semble avoir particulièrement à cœur de vaincre les combattants kurdes. Tout d’abord, le PYD et le PKK, d’inspiration socialiste, représentent des valeurs que l’EI cherche à éradiquer : l’égalité des sexes et la laïcité [37]. Des femmes se battent en effet au sein des milices kurdes. Or, selon une croyance répandue chez les djihadistes, être tué par une femme leur fermerait les portes du paradis [38].

En outre, la bataille de Kobanê constituerait une opportunité de vengeance. Début août 2014, les djihadistes pénètrent dans la région du Mont Sinjar, à l’ouest de l’Irak, à la frontière avec la Syrie [39]. Plus de 40 000 Yézidis, des Kurdes irakiens tenants d’une religion préislamique, se retrouvent piégés par l’avancée de l’EI [40]. Les peshmergas, les forces du Gouvernement Régional du Kurdistan irakien (GRK), ne peuvent faire face à la menace [41]. L’Etat islamique commence alors à massacrer les Yézidis qui ne se convertissent pas immédiatement à l’islam [42]. Le 7 août, les Etats-Unis annoncent commencer des frappes aériennes afin d’éviter un éventuel génocide [43]. Le PKK et le PYD, dans un élan de solidarité kurde [44] viennent également au secours des Yézidis et en évacuent plusieurs milliers vers la Syrie [45]. Le 13 août, le Pentagone déclare que le siège du Mont Sinjar est terminé grâce aux frappes américaines et à l’action des combattants kurdes [46]. En enrayant l’expansion de l’Etat islamique, les Kurdes ont suscité sa colère. Dès lors, al-Baghdadi ne semble pas hésiter à envoyer le plus de combattants possibles à Kobanê afin de laver l’humiliation subie au Mont Sinjar [47].

Pourtant, comme la première partie de l’article l’a évoqué, les différends sont nombreux et anciens entre le PKK et les forces du GRK. Face à l’ampleur de la menace djihadiste, les Kurdes semblent donc mettre de côté leurs divisions. Reconnaissants, les peshmergas souhaitent à leur tour venir renforcer les effectifs du PYD à Kobanê. Le 20 octobre, la Turquie, sous la pression de ses alliés de l’OTAN, autorise alors les forces du GRK à passer par la frontière turco-syrienne pour lutter contre l’Etat islamique [48]. Washington se dit « satisfait » de cette décision alors que le ministre turc des Affaires étrangères Mesut Cavusoglu s’auto-congratule : « Nous n’avons jamais voulu que Kobanê tombe. La Turquie a mené différentes initiatives pour l’empêcher ». La frontière reste cependant fermée pour les membres turcs du PKK. Gauthier Rybinski, chroniqueur international à France 24, souligne que si Erdogan laisse passer uniquement les peshmergas irakiens, c’est parce que « ce sont les bons Kurdes », ceux qui « n’ont pas de revendications territoriales en Turquie » [49].

Après plusieurs mois de combats et grâce au soutien décisif de l’Armée Syrienne Libre [50] et des Etats-Unis [51], Kobanê est entièrement libérée des djihadistes le 27 janvier 2015 [52]. Dans les semaines qui suivent, l’Etat islamique est chassé de la plupart des villages de la zone [53].

L’après Kobanê

Le siège de Kobanê aurait-il incité Ankara à repenser sa politique concernant l’Etat islamique ? Hautement médiatisée, la bataille a mis en évidence l’attentisme de la Turquie. Les images des chars turcs immobiles à la frontière alors qu’un massacre semblait se préparer ont choqué la communauté internationale. Pressée par ses alliés de l’OTAN, l’administration Erdogan s’est peu à peu engagée à soutenir davantage l’effort de guerre contre les djihadistes. En février 2015, un accord entre la Turquie et les Etats-Unis est signé et prévoit la formation sur trois ans de 15 000 combattants de l’opposition syrienne. Toutefois, un tel projet semble avant tout symbolique dans la mesure où les effectifs envisagés semblent faibles au regard de l’ampleur du conflit. En outre, Ankara a exigé que les combattants kurdes du PYD (Le Parti de l’Union Démocratique, affilié au PKK) soient écartés du programme de formation [54].

Ainsi, plutôt que de repenser sa politique, le gouvernement turc s’adapte à l’évolution du contexte et tente de montrer à ses alliés qu’il les soutient de manière plus directe qu’auparavant. Sa hantise du PKK et du PYD reste la même, et la défense des intérêts nationaux demeure la priorité. En effet, le 22 février 2015, si l’armée turque a lancé une opération terrestre en Syrie, ce n’est pas pour combattre l’Etat islamique mais pour transférer la tombe de Suleiman Chah vers un lieu plus sûr et plus proche de la frontière [55].

Au-delà de la question djihadiste, l’usage de la censure [56], la répression des manifestations [57] et la non-reconnaissance du génocide arménien [58] sont autant d’éléments qui participent à isoler le gouvernement sur la scène internationale. En outre, des livraisons d’armes auraient été faites par la Turquie à l’EI : en janvier 2014, plusieurs camions remplis d’obus, de lance-grenades et de munitions auraient été interceptés à la frontière turque. Des révélations par le journal turc Cumhuriyet vont dans le même sens : le 29 mai 2015, ce quotidien a publié des photos et des vidéos accréditant l’hypothèse de livraison d’armes par la Turquie à l’EI [59].

Le gouvernement a imposé le silence sur ce sujet. Un procureur d’Istanbul a ouvert une enquête contre le quotidien pour des faits de « terrorisme », l’accusant de diffuser des images « contraires à la réalité ». Plus de cinquante personnes liées à l’éclatement du scandale ont été placées en détention. Si le gouvernement n’a pas officiellement commenté l’affaire, un conseiller d’Erdogan a déclaré sur Twitter : « Ceux qui trahissent cette nation sentiront personnellement la force de l’Etat » [60].

Pendant la campagne électorale précédent les élections législatives du 7 juin, Erdogan a décidé de critiquer ses détracteurs [61] et de centrer ses discours sur la place de l’islam dans la société turque [62]. Ainsi, profitant d’un rassemblement annuel en l’honneur de la prise de Constantinople en 1453 par les Ottomans, il a loué la piété et l’esprit de conquête de ces derniers [63].

Le 7 juin 2015, les Turcs ont élu les 550 membres de la Grande Assemblée Nationale. Contre toute attente et en dépit des sondages plaçant le parti d’Erdogan en tête [64], celui-ci a perdu la majorité absolue à l’Assemblée, passant de 49% à 40,7% des voix et perdant environ 60 sièges, alors que le parti kurde HDP obtient 12,9% et 80 sièges. Pour la première fois depuis 2002, l’AKP sera contraint de former un gouvernement avec l’opposition [65]. Ce résultat inattendu induira-t-il une transformation de la politique d’Erdogan ?

Publié le 08/06/2015


Simon Fauret est diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques de Toulouse (Relations internationales - 2016) et titulaire d’un Master 2 de géopolitique à Paris-I Panthéon Sorbonne et à l’ENS. Il s’intéresse notamment à la cartographie des conflits par procuration et à leurs dimensions religieuses et ethniques.
Désormais consultant en système d’information géographique pour l’Institut national géographique (IGN), il aide des organismes publics et privés à valoriser et exploiter davantage les données spatiales produites dans le cadre de leurs activités (défense, environnement, transport, gestion des risques, etc.)


 


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