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Par Anne-Lucie Chaigne-Oudin
Publié le 09/03/2010 • modifié le 02/03/2018 • Durée de lecture : 3 minutes

Michel Aflaq

AFP

La création et l’idéologie du parti

Michel Aflak nait en 1912 dans une famille chrétienne orthodoxe de Damas. En 1928, il s’installe à Paris et est étudiant en histoire à la Sorbonne. Son compatriote Salahedine Bitar, sunnite, fait également ses études scientifiques à Paris. Depuis 1818, la Syrie et le Liban sont sous le mandat de la France et certains, tant en France qu’au Levant, sont favorables aux indépendances syrienne et libanaise. Pendant leur séjour, Michel Aflak et Salahedine Bitar rencontrent notamment des communistes et des socialistes français, qui sont pour l’indépendance de la Syrie et du Liban. Une fois leurs études terminées, ils rentrent en Syrie à l’été 1932, Michel Aflak devient professeur d’histoire au lycée de Damas et Salahedine Bitar enseignant les sciences dans le même établissement.

Dans le contexte troublé de la cession du sandjak syrien d’Alexandrette à la Turquie le 23 juin 1939 et de la montée des nationalismes en Syrie, au Liban et en Palestine liés aux présences mandataires françaises et britanniques, Aflak et Bitar fondent en 1939 un cercle de réflexion arabe appelé la Renaissance arabe. Pour Aflak, l’unité arabe est essentielle et sera au cœur de l’idéologie du parti Baas. En ce sens, accéder à l’indépendance est le corolaire de l’unité arabe. En 1941, le cercle de réflexion de Aflak et Bitar évolue et devient un parti appelé Baas, c’est-à-dire la résurrection. En 1943, Aflak quitte le ministère de l’enseignement pour se consacrer à son parti, dont le premier congrès de déroule à Damas en 1947. La devise du parti est instituée lors de ce congrès : « Unité-Socialisme-Liberté » et l’accent est mis sur l’unité de la nation arabe, qui appartient aux Arabes. Dans cette perspective, le parti est laïc, afin de conserver le caractère unitaire arabe et non communautaire voulu par Aflak. Outre la Syrie, le Baas se diffuse en Jordanie en 1948, au Liban en 1950 et en Irak en 1951. Mais les différentes branches du Baas ne sont pas unifiées dans leurs décisions, chacune privilégiant l’Etat dans lequel elle se trouve plutôt que les directives syriennes.

L’idéologie du Baas est donc la réalisation de l’unité arabe, par la suppression des frontières, permettant la mise en commun des ressources de chaque pays. Mais le parti, s’il adhère aux idées socialistes, refuse le communisme et son corollaire que sont la lutte des classes et l’absence de libertés.

Le Baas au pouvoir

Le parti Baas, d’origine syrienne où il reste prépondérant, se développe essentiellement en Irak à la faveur de la révolution irakienne de 1958. En Syrie, la création de la République Arabe Unie avec l’Egypte le 1er février 1958 diminue le rayonnement du Baas, allant jusqu’à sa dissolution en 1958 par Aflak. Il se reconstitue néanmoins dans la clandestinité dès 1959. Les coups d’Etat perpétrés en 1963 en Irak (février) et en Syrie (mars) le portent au pouvoir. En Irak, après diverses péripéties pendant la présidence des frères Araf (1963-1968), le Baas, dirigé par Saddam Hussein et le général Ahmad al-Bakr, s’empare à nouveau du pouvoir à la suite de la révolution du 17 juillet 1968 et reste jusqu’en 2003. En Syrie, le coup d’Etat de mars 1963 permet à Salahedine Bitar de devenir Premier ministre. En 1966, à la suite d’un nouveau coup d’Etat perpétré le 23 février, la Baas est remplacé par le néo-Baas, proche de l’Egypte. Aflak et Bitar sont contraints à l’exil, Aflak se refugie notamment à Beyrouth, puis à Bagdad à partir de 1968 où il meurt en 1989. Le Baas se maintien au pouvoir pendant la présidence d’Hafez al-Assad, qui meurt le 10 juin 2000, et pendant la présidence de son fils Bachar al-Assad. En Syrie à partir de 1966 et en Irak à partir de 1968, le Baas garde les prérogatives du pouvoir par plusieurs moyens : Etat policier, armée baasiste, répression contre les opposants, pas de pluralisme des partis, pas de liberté syndicale.

Aujourd’hui, l’idéologie du parti est éloignée de celle d’origine en raison des difficultés à mettre en œuvre l’unité arabe et de l’abandon progressif du socialisme au profit d’une ouverture économique.

A lire :
Olivier Carré, Le nationalisme arabe, Fayard, Paris, 1993, 302 pages.
Caroline Donati, L’exception syrienne entre modernisation et résistance, La découverte, Paris, 2009, 354 pages.
Charles Saint-Prot, Le nationalisme arabe alternative à l’intégrisme, Ellipses, Paris, 1996, 125 pages.

Publié le 09/03/2010


Anne-Lucie Chaigne-Oudin est la fondatrice et la directrice de la revue en ligne Les clés du Moyen-Orient, mise en ligne en juin 2010.
Y collaborent des experts du Moyen-Orient, selon la ligne éditoriale du site : analyser les événements du Moyen-Orient en les replaçant dans leur contexte historique.
Anne-Lucie Chaigne-Oudin, Docteur en histoire de l’université Paris-IV Sorbonne, a soutenu sa thèse sous la direction du professeur Dominique Chevallier.
Elle a publié en 2006 "La France et les rivalités occidentales au Levant, Syrie Liban, 1918-1939" et en 2009 "La France dans les jeux d’influences en Syrie et au Liban, 1940-1946" aux éditions L’Harmattan. Elle est également l’auteur de nombreux articles d’histoire et d’actualité, publiés sur le Site.


 


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