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Par Lisa Romeo
Publié le 19/12/2011 • modifié le 02/03/2018 • Durée de lecture : 4 minutes

La résistance palestinienne dans la capitale jordanienne

La défaite des armées arabes face à Israël lors de la guerre des Six jours de 1967 pousse les organisations de la résistance palestinienne à mieux s’organiser et à s’orienter dans la lutte armée. L’OLP, fondé en 1964 au Caire, sort discréditée du conflit et son président Ahmad al-Shuqayri (1908-1980) est contraint de démissionner. Lors du quatrième Congrès national palestinien de juillet 1968, les différentes organisations de résistance rejoignent l’OLP, le groupe Fatah y devient majoritaire et son chef Yasser Arafat prend sa direction en février 1969. L’organisation développe dorénavant une aide civile dans le cadre de l’enseignement, de la santé, des pensions sont versées aux familles des résistants morts au combat.

Depuis la guerre de 1967, l’OLP renforcée fait d’Amman, capitale du royaume hachémite de Jordanie, sa principale base. C’est d’ailleurs dans les camps jordaniens que la résistance recrute le plus de volontaires et peut compter sur son plus important soutien. Il faut dire que les deux tiers de la population du royaume sont d’origine palestinienne et que l’on compte plus de 1,3 millions de réfugiés dans le pays depuis la guerre de 1967. Si le roi Hussein laisse, dans un premier temps, circuler librement les forces armées palestiniennes et se montre assez tolérant, il voit rapidement d’un mauvais œil la montée en force de ce contre-pouvoir qui menace directement son autorité.

La montée des tensions jordano-palestiniennes

Favorisant l’action armée, l’OPL lance une série de commandos contre l’Etat hébreu depuis le territoire jordanien qui subit en contre partie les ripostes de l’armée israélienne. La multiplication des représailles israéliennes crée des tensions dans les relations entre la résistance palestinienne et le régime jordanien. Les incidents se multiplient à partir de 1968 et posent la question du statut de la résistance dans le pays qui apparaît comme étant de plus en plus incontrôlable. Le général Kilami, ministre de l’Intérieur, annonce le 10 février 1970 des mesures limitant la liberté des fedayins les obligeant, par exemple, à demander une autorisation avant toute publication. Les résistants voient dans cet acte une véritable déclaration de guerre et organisent des manifestations qui tournent rapidement à l’affrontement. Le roi finit par céder et suspend le décret dix jours plus tard.

Vers la radicalisation de la résistance palestinienne

Mais la tension ne se relâche pas pour autant et l’OLP, sous l’influence grandissante du FPLP de Georges Habache, se radicalise et multiplie les attentats au cours de l’été 1970. Le 9 juin 1970, le roi Hussein échappe à une tentative d’assassinat. Les hôtels Intercontinental et Philadelphia d’Amman sont ensuite pris en otage. Contre la libération de la clientèle des deux hôtels, le FPLP exige la démission de Nasser Ben Jamil, Commandant en chef de l’armée et oncle du roi, ainsi que de Zaïd Ben Chaker, chef de la troisième division blindée. Le roi accepte une nouvelle fois leur condition et réaffirme même, le 10 juillet, la liberté d’action et de sécurité des fédayins, laissant un gout amer dans les rangs de l’armée jordanienne.

Alors que le roi Hussein cherche à renforcer la loyauté des Palestiniens en reprenant l’initiative dans la recherche d’un accord israélo-arabe, il se heurte au rejet du plan Rogers par l’OLP. Cette dernière accuse l’Egypte et la Jordanie de trahison car ces deux Etats ont accepté ce plan qui prévoit un cessez-le-feu ; la reprise des négociations sur la base de la résolution 242 qui réduit le peuple palestinien à une communauté de réfugiés et se consacre uniquement au sort des Palestiniens de l’intérieur ; affirme la légitimité de l’Etat hébreu. L’OLP menace dorénavant ouvertement le pouvoir hachémite en faisant d’Amman la base révolutionnaire de la libération de la Palestine.

L’escalade de la violence : Septembre noir

Le 1er septembre 1970, le roi échappe une nouvelle fois à un attentat contre sa personne. Quelques jours plus tard, le 6 septembre, le FPLP parvient à détourner trois avions de ligne vers la ville de Zarka au nord du pays dont l’aéroport devient une « zone libérée ». La lutte s’étend alors contre tous les intérêts du sionisme et de l’impérialisme auquel il est assimilé. Le but est également de sensibiliser l’opinion internationale, souvent indifférente, au sort des Palestiniens et des réfugiés.
Le 17 septembre, le Comité central de l’OLP appelle à la grève générale, et la tension est à son comble. Le roi Hussein, à la recherche de son autorité bafouée, décide de « débarrasser » définitivement son territoire de la résistance palestinienne. Il lance, le jour même, une offensive contre Amman et les villes du Nord et les camps. Les populations civiles palestiniennes ne sont pas épargnées. Le 27 septembre, Arafat et Hussein signent un accord au Caire sous l’égide du président égyptien Nasser. Le traité autorise l’action armée de l’OLP en Jordanie tout en réaffirmant la souveraineté du gouvernement jordanien. Les affrontements ne cessent pas pour autant. En effet, constatant que les Etats arabes n’interviendront pas, Hussein nomme Wasfi al-Tall Premier ministre le 28 septembre 1970 et le charge de rétablir la prééminence de son pouvoir. En moins d’un an, les fedayins sont totalement éliminés du royaume. Evincée de Jordanie, l’OLP se réimplante au Liban où elle peut jouir d’une grande autonomie politique et militaire. L’affrontement jordano-palestinien marque par ailleurs l’échec du plan Rogers et l’impasse d’un règlement israélo-arabe.

L’organisation Septembre noir

En outre, les évènements de 1970 vont donner naissance à une nouvelle fraction du Fatah prénommé Septembre noir et dont l’acte fondateur sera l’assassinat du Premier ministre jordanien Wasfi al-Tall le 28 novembre 1971. Cet organisme se spécialise dans le terrorisme international et commandite près de quarante attentats dans le monde, en particulier le massacre des athlètes israéliens lors des Jeux Olympiques de Munich, en Allemagne, en 1972. L’organisation est finalement dissoute en 1973 sous la pression des Etats arabes.

Bibliographie :
Vincent Cloarec, Henry Laurens, Le Moyen-Orient au 20ème siècle, Paris, Armand Colin, 2005.
Alain Gresh, Dominique Vidal, Les 100 clés du Proche-Orient, Paris, Hachette Littératures, 2006.
Nadine Picaudou, Les Palestiniens, un siècle d’histoire, Bruxelles, Editions Complexe, 2003.

Publié le 19/12/2011


Lisa Romeo est titulaire d’un Master 2 de l’université Paris IV-Sorbonne. Elle travaille sur la politique arabe française en 1956 vue par les pays arabes. Elle a vécu aux Emirats Arabes Unis.


 


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