Territoires palestiniens, Syrie, Liban : point de situation sur les opérations militaires israéliennes au Proche-Orient (2/2). Au Liban et en Syrie

Lire la partie 1 : Territoires palestiniens, Syrie, Liban : point de situation sur les opérations militaires israéliennes au Proche-Orient (1/2). A Gaza

II. Des « zones de sécurité » israéliennes porteuses de tensions au Liban et en Syrie

Contrairement à Gaza, le cessez-le-feu au Liban conclu le 27 novembre 2024 est officiellement toujours en vigueur malgré des violations répétées de la part des deux belligérants, à savoir Israël et le Hezbollah. Prétextant les violations commises par leur adversaire, l’un et l’autre ont donc procédé à de nombreuses attaques : si le Hezbollah a ainsi tiré des roquettes à plusieurs reprises contre Israël, notamment fin mars [1], Israël a également conduit de nombreuses frappes, y compris sur Beyrouth, la dernière datant du 28 mars [2]. Le 22 avril, l’armée israélienne affirmait avoir tué 140 combattants du Hezbollah depuis la mise en place du cessez-le-feu. Ces frappes auraient provoqué la mort d’au moins 71 civils selon les Nations unies [3].

La situation reste toujours particulièrement tendue : en dépit des conditions du cessez-le-feu qui prévoyait un retrait complet de l’armée israélienne des régions méridionales du Liban, cette dernière continue d’y occuper cinq positions que Tel Aviv décrit comme étant des « zones de sécurité » [4] mais que Beyrouth caractérise de zones « d’occupation » [5]. Le Hezbollah, de fait, refuse d’être désarmé, en dépit des efforts de l’armée libanaise en ce sens : si le président libanais Joseph Aoun a annoncé le 20 avril qu’un tel désarmement était une opération « délicate » [6], celle-ci est toutefois en cours et des officiers israéliens ont admis, le 23 avril, que l’armée libanaise « faisait plus qu’ils ne l’avaient imaginé » en la matière [7] ; le 20 avril, des soldats libanais seraient ainsi parvenus à empêcher un tir de roquettes contre Israël lors d’un raid à Sidon par exemple [8]. Les autorités libanaises s’emploient, de fait, à coopérer autant que possible avec l’Etat hébreu afin de prévenir toute reprise à grande échelle des opérations israéliennes dans le pays qui avaient causé, du 8 octobre 2023 au 26 novembre 2024, la mort de près de quatre mille personnes [9]. Beyrouth et Tel Aviv ont ainsi initié, le 11 mars 2025, des négociations afin de résoudre les différends frontaliers opposant les deux pays, qu’il s’agisse des cinq positions occupées par l’armée israélienne ou des treize points litigieux le long de la Ligne bleue marquant, aujourd’hui, la frontière de facto entre Israël et le Liban [10]. En guise de bonne volonté, les autorités israéliennes ont libéré presque aussitôt cinq Libanais qu’elles détenaient au Liban, dont un membre du Hezbollah [11].

L’engagement militaire israélien à Gaza et au Liban afin d’y établir des « zones de sécurité » se poursuit également en Syrie, où les forces israéliennes entretiennent des objectifs similaires. Pour rappel, les forces israéliennes ont initié le 8 décembre 2024, jour de la chute du régime de Bachar al-Assad, une offensive presque sans combat leur ayant permis de s’emparer de la totalité du plateau du Golan et de la zone tampon armée par l’ONUST ainsi que de territoires dans le sud-ouest de la Syrie incluant la ville d’al-Quneitra. Ces opérations terrestres se sont accompagnées d’une campagne de frappes aériennes intensives à travers le pays contre les infrastructures et matériels militaires syriens ayant réduit drastiquement les capacités militaires de la Syrie. La volonté du gouvernement israélien de s’implanter durablement dans le sud du pays afin d’y créer une « zone de sécurité » n’est pas un secret : en mars, le Premier ministre Benjamin Netanyahu annonçait son intention d’aménager une zone d’influence en créant des alliances avec certaines minorités locales - notamment les Druzes - et établir une zone démilitarisée le long de la frontière [12]. Pour autant, incapable pour le moment de contrer Israël et soucieux de s’attirer les bonnes faveurs de l’Europe et surtout des Etats-Unis, le président intérimaire syrien Ahmed al-Chareh aurait déclaré le 24 avril à une délégation américaine en visite à Damas qu’il se tenait prêt à normaliser ses relations avec Israël « sous certaines conditions » n’ayant pas été détaillées pour le moment [13].

Conclusion

Malgré le soutien des Etats-Unis à Israël et l’établissement de cessez-le-feu ou de canaux de négociations entre belligérants, la situation reste encore hautement volatile et porteuse de violences meurtrières, tant sur le territoire gazaoui que cisjordanien, israélien, libanais ou même syrien. Des acteurs extérieurs au Proche-Orient, comme les Houthis, entendent par exemple poursuivre la guerre contre Israël et les Etats-Unis : le 23 avril encore, pour la première fois depuis le début du conflit, un missile tiré par les Houthis était intercepté au-dessus de la ville côtière de Haïfa, par exemple [14]. La capacité de la communauté internationale à trouver une solution à ce conflit apparaît non seulement faible mais aussi vacillante et semble, à l’heure actuelle, donner les coudées franges au gouvernement israélien pour mener ses projets sécuritaires, territoriaux et politiques dans les Territoires palestiniens et dans son voisinage immédiat.