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Vers un nouveau plan de paix américain au Moyen-Orient (2/2) ?

Par Anne-Lucie Chaigne-Oudin
Publié le 02/09/2010 • modifié le 23/04/2020 • Durée de lecture : 6 minutes

US President Barack Obama © walks with Prime Minister Benjamin Netanyahu of Israel (L) and President Mahmoud Abbas of the Palestinian Authority on September 1, 2010 at the White House in Washington, DC.

TIM SLOAN / AFP

Les nouvelles orientations de la diplomatie américaine

La détermination de Barack Obama s’exprime par plusieurs mesures : par une nomination tout d’abord, celle de l’envoyé spécial pour le Moyen-Orient George Mitchell, qui effectue de nombreuses missions. Suivent ensuite les réorientations diplomatiques. En Irak, selon l’accord signé entre les Etats-Unis et l’Irak en novembre 2008, il est prévu que l’armée américaine se redéploie des villes fin juin 2009, que les troupes de combat quittent l’Irak le 31 août 2010, le retrait définitif des forces américaines étant prévu pour la fin 2011. Dans ce contexte, la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton se rend en Irak le 25 avril 2009, afin de rassurer les Irakiens sur la poursuite des liens avec les Etats-Unis. Le retrait d’Irak, Etat qui n’est pas considéré par Barack Obama comme un centre de terrorisme, s’explique par le recentrage américain sur l’Afghanistan. Enfin, Barack Obama croit en la nécessité de créer un Etat palestinien. Sur le terrain, les deux alliés des Etats-Unis sont la Jordanie et l’Egypte. Le roi Abdallah II de Jordanie s’est notamment rendu à Washington le 22 avril 2009, et au cours de sa visite, le président américain l’a assuré de sa détermination à trouver une solution au conflit israélo-palestinien et à créer un Etat palestinien. Le 18 août, c’est au tour du président Hosni Moubarak d’être invité à la Maison-Blanche. Concernant la Syrie, l’arrivée de Barack Obama au pouvoir marque un réchauffement des relations entre les deux Etats. Dans ce nouveau contexte, Hillary Clinton, en visite au Liban le 26 avril 2009, rassure les Libanais sur les liens entretenus avec les Etats-Unis.

Le discours du Caire

C’est dans cette nouvelle configuration diplomatique que le président Barack Obama entreprend une tournée diplomatique au Moyen-Orient début juin. Une première étape le conduit en Arabie saoudite le 3 juin, suivie d’une visite en Egypte, ces deux Etats étant en effet des médiateurs dans la poursuite du processus de paix. Le 4 juin, le président Obama s’exprime à l’université du Caire. Son discours porte, entre autres thèmes, sur la nécessité de réconcilier l’Islam et les Etats-Unis, sur l’engagement en Afghanistan, sur le retrait d’Irak, sur la résolution du conflit israélo-palestinien et sur la question du nucléaire iranien. Sur l’Afghanistan, Barack Obama explique « Ne vous y trompez pas : nous ne souhaitons pas que nos troupes restent en Afghanistan. Nous ne cherchons pas à y établir des bases militaires. (…) C’est la raison pour laquelle nous sommes membres d’une coalition de 46 pays ». Le président rappelle également les étapes du retrait américain d’Irak (retrait des troupes dans les villes irakiennes en juillet 2009, retrait des forces américaines pour la fin 2011), et les objectifs de ce retrait : « aider les Irakiens à bâtir un avenir meilleur et laisser l’Irak aux Irakiens. J’ai dit clairement au peuple irakien que nous ne voulions aucune base, ne revendiquons aucun territoire ou ressource. La souveraineté de l’Irak lui appartient ». Concernant les relations israélo-palestiniennes, Barack Obama rappelle en premier lieu les liens historiques qui unissent les Etats-Unis et Israël, ainsi que les « persécutions » du peuple juif au cours de l’histoire. Les souffrances des Palestiniens sont ensuite abordées, dans le cadre de leur recherche d’une patrie. Il se prononce pour la création d’un Etat palestinien indépendant. Dans ce contexte, le président Obama estime que « la seule solution pour répondre aux aspirations des deux côtés passe par deux Etats, où Israéliens et Palestiniens vivront chacun en paix et en sécurité ». Les moyens pour y parvenir sont la fin de la violence du côté palestinien, et notamment du Hamas ; le développement de structures institutionnelles pour l’Autorité palestinienne ; la reconnaissance du droit à exister pour Israël mais également la même reconnaissance pour la Palestine ; l’arrêt de la colonisation israélienne dans les territoires palestiniens. Enfin, et dans un sens plus large, le président Obama appelle les Etats arabes à poursuivre leur implication dans le processus de paix et notamment à ne pas utiliser ce conflit « pour détourner les peuples des nations arabes d’autres problèmes ».

Ainsi, dans le cadre de la résolution du conflit israélo-palestinien, le président Obama propose donc la création d’un Etat palestinien et la fin de la colonisation juive dans les Territoires palestiniens, comme cela avait déjà été prévu par la « feuille de route » de 2002 et réaffirmé lors du sommet d’Annapolis de novembre 2007. Il propose également l’arrêt de la violence et la reconnaissance du droit à exister aussi bien pour Israël que pour la Palestine.

Des pourparlers indirects aux négociations directes

Mais une succession d’événements met en lumière les réticences du gouvernement israélien à suivre les propositions de Barack Obama. Dès avril 2009, alors que la diplomatie américaine évoque déjà la création d’un Etat palestinien et l’arrêt de la colonisation israélienne, Benyamin Nétanyahou, Premier ministre nouvellement investi le 30 mars 2009, ne se prononce pas sur la question de l’Etat palestinien et début avril, le ministre israélien des Affaires étrangères Avigdor Lieberman remet en cause l’accord signé à Annapolis. Le 16 avril, lors de la visite de George Mitchell en Israël au cours de laquelle il réaffirme les objectifs américains, Benyamin Nétanyahou demande comme préalable la reconnaissance d’Israël par les Palestiniens. Au cours de la visite de ce dernier à Washington le 18 mai, le président Obama réaffirme la nécessité pour Israël d’arrêter la colonisation et de reconnaître la création de l’Etat palestinien. Le 24 mai, Benyamin Nétanyahou, toujours réservé sur la création d’un Etat palestinien se dit en revanche favorable au démantèlement des colonies illégales, mais pas à l’arrêt des constructions dans les colonies déjà existantes. Néanmoins, en réponse au discours du Caire prononcé par Barack Obama, Benyamin Nétanyahou accepte la création d’un Etat palestinien, à la condition que celui-ci soit démilitarisé. Quant à la question de la colonisation, tandis que Barack Obama, Hillary Clinton et George Mitchell demandent à plusieurs reprises au printemps et à l’été le gel total des colonies, Israël dit vouloir poursuivre les constructions dans les colonies déjà établies. C’est ainsi que le 7 septembre, Benyamin Nétanyahou autorise la construction de 455 nouveaux logements dans les colonies de Cisjordanie et de Jérusalem-Est.

Mais à partir de cette date, le discours de la diplomatie américaine, soucieuse de conserver des relations de confiance avec Israël, évolue : la reprise des négociations de paix prime sur la question du gel des colonies. C’est ainsi que le 30 octobre, Hillary Clinton, au cours d’une étape en Israël, appelle à la reprise des négociations de paix et renonce à exiger le gel total des colonies israéliennes en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. La diplomatie américaine demande donc aux Palestiniens de reprendre les négociations « sans conditions », c’est-à-dire sans que les Palestiniens aient obtenus le règlement de la question des colonies. Néanmoins, le 25 novembre, la diplomatie américaine contraint Israël à suspendre pour dix mois la construction de logements dans les colonies de Cisjordanie, étant exclu de ce gel les constructions en cours. L’expiration du moratoire est prévue pour le 26 septembre 2010.

A partir de janvier 2010, George Mitchell effectue de nombreuses visites au Moyen-Orient. L’objectif est de relancer le processus de paix, au point mort depuis l’opération « Plomb durci », et de parvenir à un accord dans les deux ans. Il est ainsi prévu que des discussions indirectes débutent le 8 mars entre Israël et l’Autorité palestinienne, sous l’égide de George Mitchell, pour une durée de quatre mois. Mais le 10 mars, alors que le vice-président américain Joe Biden est en visite à Jérusalem afin de discuter de la relance des négociations de paix, l’annonce de la décision israélienne de construire 1600 logements à Jérusalem-Est met fin aux négociations. S’ouvre alors une crise diplomatique entre Israël et les Etats-Unis. Lors de sa visite à Washington du 21 au 25 mars, Benyamin Nétanyahou réaffirme notamment que Jérusalem est la capitale de l’Etat d’Israël.

En mai 2010, les efforts de la diplomatie américaine et de George Mitchell permettent de relancer les négociations indirectes. Mais le climat reste tendu, en raison de divergences entre Israéliens et Palestiniens sur plusieurs questions : le statut de Jérusalem, les frontières entre Israël et le futur Etat palestinien, la colonisation en Cisjordanie, la question des réfugiés palestiniens et celle de l’eau. Lors de la visite de Benyamin Nétanyahou aux Etats-Unis du 5 au 8 juillet, le dialogue est renoué et la forte et indéfectible amitié entre les deux Etats est rappelée. Barack Obama annonce également son souhait d’une reprise des négociations directes entre Israéliens et Palestiniens, avant l’expiration du gel de la construction de logements dans les colonies de Cisjordanie, prévue pour le 26 septembre 2010.

C’est dans ce contexte qu’intervient l’annonce d’Hillary Clinton le 20 août : les négociations directes reprendront à Washington le 2 septembre. Plusieurs acteurs régionaux se montrent sceptiques sur la réussite de ces négociations, d’autant plus que Benyamin Nétanyahou a d’ores et déjà annoncé ne pas vouloir reconduire le gel des constructions.

Le 2 septembre, les pourparlers de paix directs s’ouvrent à Washington. Les principaux thèmes qui feront l’objet des négociations sont la question des colonies, la création d’un Etat palestinien, Jérusalem comme capitale, le droit au retour des réfugiés et la question de l’eau. Ces négociations s’ouvrent alors que les dernières troupes de combat américaines viennent de quitter l’Irak le 31 août et que plusieurs voix se font entendre sur la nécessité du maintien du soutien américain. En outre, sur le plan intérieur, le contexte politique américain est tendu à l’approche des élections de mi-mandat.

Lire la partie 1 :Vers un nouveau plan de paix américain au Moyen-Orient (1/2) ?

Publié le 02/09/2010


Anne-Lucie Chaigne-Oudin est la fondatrice et la directrice de la revue en ligne Les clés du Moyen-Orient, mise en ligne en juin 2010.
Y collaborent des experts du Moyen-Orient, selon la ligne éditoriale du site : analyser les événements du Moyen-Orient en les replaçant dans leur contexte historique.
Anne-Lucie Chaigne-Oudin, Docteur en histoire de l’université Paris-IV Sorbonne, a soutenu sa thèse sous la direction du professeur Dominique Chevallier.
Elle a publié en 2006 "La France et les rivalités occidentales au Levant, Syrie Liban, 1918-1939" et en 2009 "La France dans les jeux d’influences en Syrie et au Liban, 1940-1946" aux éditions L’Harmattan. Elle est également l’auteur de nombreux articles d’histoire et d’actualité, publiés sur le Site.


 


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