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« Jérusalem, de la forteresse cananéenne aux Lieux saints de toutes les querelles » numéro spécial du magazine L’Histoire, juillet – août 2012

Par Astrid Colonna Walewski
Publié le 20/08/2012 • modifié le 10/03/2018 • Durée de lecture : 4 minutes

La ville juive

La première partie retrace l’histoire antique de la ville, en confrontant récits bibliques et découvertes archéologiques. Jérusalem fut une ville cananéenne où se dressait une forteresse érigée au XVIIIème siècle avant J-C. Au Xème siècle, elle devint la capitale du royaume de David. Katell Berthelot précise la configuration et la symbolique du Temple, plusieurs fois détruit et reconstruit. La ville connût une grande prospérité au VIIIème siècle, qu’elle ne pût retrouver après sa destruction par Nabuchodonosor.

Dan Bahat énonce les difficultés auxquelles sont confrontés les archéologues, du fait des enjeux politiques et religieux puissants en ce lieu sacré et disputé. Depuis 1967, seules les équipes israéliennes travaillent à Jérusalem. L’esplanade des Mosquées, supervisée par les musulmans, est interdite de fouilles.

Au cours de la période de domination grecque ouverte par la conquête d’Alexandre le Grand en 332 avant J-C, Jérusalem réussit à préserver sa spécificité et sa religion. Mireille Hadas-Lebel revient sur la tentative du roi Antiochus IV d’imposer un mode de vie à la grecque, et l’influence hellénistique visible sous la monarchie hasmonéenne.

Maurice Sartre analyse les relations entre Rome et Jérusalem, « la ville ingouvernable de l’Empire romain ». Des gouverneurs hostiles au monothéisme, en particulier Hérode, imposèrent les dieux romains. La révolte des Juifs se solda par la destruction du Temple le 30 août de l’an 70, et le dépeuplement de la ville s’accrût avec les mesures prises par l’empereur Hadrien à l’encontre des juifs. La conversion de Constantin au christianisme marqua un véritable tournant dans l’histoire de Jérusalem. Marie-Françoise Baslez reconstitue l’itinéraire de Jésus à travers la Ville sainte le jour de sa Passion, en détaillant l’emplacement des quatorze étapes du chemin de croix.

Entre chrétiens et musulmans

La deuxième partie du magazine traite des conflits entre l’Orient et l’Occident, essentiellement à l’époque des croisades. Yann Potin évoque les « tribulations » de la Croix de la Passion, placée au Saint Sépulcre à sa « découverte » par Hélène, mère de l’empereur Constantin. Elle ne cessa d’être morcelée et déplacée au gré des invasions et des circonstances politiques. En rapportant de croisade un fragment de la Croix, qu’il plaça à la Sainte Chapelle en 1241, Saint Louis transférait une partie de la Ville sainte à Paris et faisait de sa capitale une « nouvelle Jérusalem ».

Gabriel Martinez-Gros explique la place particulière qu’occupe Jérusalem dans l’islam. Mahomet s’éleva au ciel depuis le Rocher du mont du Temple, où le calife Abd al-Malik fit construire le Dôme du Rocher ainsi que la mosquée Al-Aqsa. La troisième Ville sainte de l’islam fût protégée aux Xème et XIème siècles par les Fatimides, avant d’être menacée par les Seldjoukides puis les Francs.

Selon Dominique Iogna-Prat, « l’Occident inventa la Terre sainte » à l’époque des croisades. L’auteur évoque les représentations symboliques qui font de Jérusalem la ville rêvée, maintes fois dupliquée dans les églises occidentales. Une biographie de Maurice Halbwachs, auteur de La topographie légendaire des évangiles en Terre sainte publié en 1941, complète l’article.

Isabelle Heullant-Donat rend compte de la puissance des Franciscains, qui se sont imposés comme les gardiens des Lieux saints, notamment grâce au soutien de papes et souverains latins. Julien Loiseau décrit la Jérusalem islamique, magnifiée par les sultans depuis Saladin jusqu’à Soliman le Magnifique par la construction de mosquées, madrasas, marchés. Jean-Christophe Attias montre la place centrale qu’occupe Jérusalem dans l’imaginaire juif médiéval : les références à la Ville sainte se retrouvent dans la poésie, les synagogues, les légendes édifiées par les juifs dans leur exil.

De la question d’Orient au « corpus separatum »

La majeure partie de la revue se concentre sur la période contemporaine, marquée par le démantèlement de l’Empire ottoman, la montée du sionisme et le conflit israélo-palestinien. Vincent Lemire voit la Jérusalem du XIXème siècle comme une ville, une cité qui se dote d’une municipalité moderne et même pionnière dans l’Empire ottoman. Les habitants des trois religions monothéistes partageaient alors une citadinité commune, perturbée au XXème siècle par les Britanniques qui jouèrent le jeu des rivalités confessionnelles.

Catherine Nicault précise la vision qu’avait Theodor Herzl de Jérusalem : déçu par la ville à bien des égards, il souhaitait qu’elle ait un statut international. Dominique Trimbur se penche sur le retour des catholiques à Jérusalem au cours des XIXème et XXème siècles, qui s’effectue notamment grâce au dynamisme des ordres religieux et à la volonté politique de rendre à la France une place importante en Terre sainte. Henry Laurens identifie cinq étapes dans la querelle qui opposa aux XIXème et XXème siècles les puissances européennes pour le contrôle des Lieux saints. Des repères cartographiques permettent de visualiser l’évolution des frontières.

Après un article de Frédéric Encel sur l’attentat de l’hôtel King David en 1946 par l’Irgun, Alain Dieckhoff décrit la division qui règne à Jérusalem depuis la « réunification » de 1967. Si Arabes et Juifs évoluent dans des mondes différents, des divisions existent également au sein de la communauté juive.
En conclusion, six personnalités livrent leur conception de l’avenir de la Ville sainte.

Publié le 20/08/2012


Après avoir obtenu une licence d’Histoire à l’université Paris IV Sorbonne, Astrid Colonna Walewski étudie actuellement à l’Université Catholique de Louvain en Master de Relations Internationales. Elle suit des cours de spécialité sur le monde arabe et écrit un mémoire sur la révolution égyptienne.


 


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